vendredi 30 août 2013

Jean Daniel, le Pied-Noir qui fascine....


Jean Daniel Benzaïd est un écrivain et journaliste français, fondateur du Nouvel Observateur

 Je lis Miroirs d'une vie de Jean Daniel

Peut-on vivre après la Shoah? Sans cette distance qui réussit à mettre les intempéries entre parenthèses, nous ne saurions jamais être que des survivants ballottés par l'instant. Or, aucune de ces agressions, aucune de nos épreuves n'a réussi à me détourner d'une gourmandise irrépressible de la vie, de la volupté procurée par la mer, de la somptuosité d'un paysage méditerranéen et de la gloire des femmes. Rien ne m'a jamais fait cesser d'attendre les oranges sanguines de février et les raisins muscats de septembre. Les forces de l'esprit, la vigueur animale des sens et la nature des choses nous abritent de la mort.

Né en Algérie française et juif descendant probablement des Berbères il y a des siècles, je n'ai vraiment commencé à découvrir ma terre natale qu'avec les grands textes littéraires qui lui étaient consacrés dans la langue française. C'est Pierre Loti qui le premier m'en a dit les tristesses et les charmes et qui m'a appris à connaître l'humiliation. C'est Gide qui a chanté les sortilèges de Blida où je suis né. C'est Montherlant qui a découvert à Alger qu'il y avait encore des paradis. Et il m'a fallut attendre Camus pour que Noces me révèle une magie tantôt païenne, tantôt panthéiste qui m'habitait sans que j'en eusse conscience. Quant aux Arabes, qui étaient en réalité des Kabyles, me semblaient trouver leur vérité qu'au travers de la France. Et l'histoire des Berbères me passionnait.

Je ne parlais pas arabe, mes parents ne pariaient pas sur un avenir arabe. Mon Algérie était pénétrée, colorée et irriguée par la France. Je ne savais pas non plus l'hébreu sauf quelques prières. J'ai été élevé dans un univers où l'on considérait avec bonne conscience que la civilisation arabe était inférieure et qu'il fallait tout faire pour la hisser jusqu'à nous. C'est en Tunisie, dans la compagnie des artistes et des écrivains de Sidi Bou Saïd que j'ai eu mes premiers vrais amis arabes. Mais c'est dans un hôpital, où j'ai été soigné à leurs côtés, qu'il m'a semblé découvrir, à travers la tendresse des Tunisiens, une des faces secrètes de l'énigme de l'âme arabe, celle du don.

Je veux faire à qui j'aime le plus précieux des présents où le soleil part...
Alors je te ferai don d'un palmier pour que ses palmes te soient louanges (Charles Roy)

jeudi 29 août 2013

Le Lipitor (statine) et la mémoire


Sur 171 patients sous statines se plaignant de troubles de la mémoire entravant sérieusement leur qualité de vie intellectuelle, 143 stoppent le traitement et 128 voient disparaître leurs troubles de mémoire en deux ou trois semaines, qui réapparaissent chez les 19 qui reprennent le traitement.

Les dépressions, troubles du sommeil, confusions, les réactions agressives (parfois extrêmement violentes)  sont disparus en un mois, à l'arrêt du traitement. (Drug Safety, 2007, 30:195)

Les myalgies et les douleurs musculo-tendineuses sont devenues la marque des essais sur les statines.

Le rôle du CHO dans la robustesse des membranes cellulaires et la fonction immunologique majeure de plus en plus évidente de la barrière cutanée, laissent craindre des complications cutanées dermatologiques. Cas d'érythèmes, d'éruptions maculopapuleuses, éruptions lichenoïdes, photosensibilisations, urticaires, eczémas, prurits, psoriasis etc... sont apparus dans les quatre premières semaines du traitement et guéris à l'arrêt des statines (Lipitor, Tahor...)

Les statines induisent le diabète, si cela est confirmé, les statines apparaissent comme un des facteurs de la pandémie de diabètes apparus depuis vingt ans.


Y a de quoi réfléchir....

Le cholestérol, un cristal structuré comme les nervures d'un vitrail gothique.


Découvert dans les calculs biliaires en 1784, baptisé par Chevreul en 1815, il en tire son nom (chole: bile). Elle est si précieuse que contrairement à la plupart des autres molécules, elle n'est jamais détruite par l'organisme. C'est une des clés essentielles de la vie, et la plus décorée des molécules. Sa synthèse et ses fonctions ont justifié 13 prix Nobel. Le CHO (cholestérol) c'est un cristal, structuré comme les nervures d'un vitrail gothique. Le cristal se termine par un radical alcool;  c'est un alcool lourd, un cristal à pointe d'alcool, avec quoi il harponnera et transportera les acides gras. Pour la synthétiser, il faut trois étapes successives. Aucune molécule n'est si lente et difficile à fabriquer. Jamais il n'est oxydé ou brûlé, il est trop précieux. Le CHO, né dans le foie  doit être transporté partout et il est insoluble dans l'eau.

Aucune enquête ne démontre de lien entre la mortalité cardiaque et le CHO. Le CHO est aussi la cause diabolique de l'athérome  et évidemment les statines sont un don du ciel à un coût prohibitif. L'histoire commence par une erreur médicale qui avait fait du CHO le principal responsable de l'athérome, des infarctus du myocarde et des AVC. L'industrie pharmaceutique a très vite perçu l'ampleur du marché qui s'ouvrait. Les grandes firmes se sont aussitôt engouffrées dans la brèche et ont conquis un marché gigantesque, devenu en quelques années le premier marché médicamenteux du monde. Ainsi 200 millions d'hommes et de femmes dans le monde ont été placés en quelques années sous statines. Pour rien.

Ces vingt dernières années, le gouvernement fédéral américain et des associations de malades ont intenté vingt-deux procès à l'industrie pharmaceutique internationale, où elle a été contrainte, sur commissions rogatoires de la Justice, d'ouvrir ses dossiers secrets et de dévoiler ses résultats bruts. Vingt-deux fois sur vingt-deux, la preuve a été apportée de la falsification des résultats, de mise à l'écart des résultats qui gênent, de l'embellissement de ceux qui peuvent lui être utiles, du refus de publier les études négatives et vingt-deux fois sur vingt-deux l'industrie a été lourdement condamnée. Il y a quelques mois (GSK, Pfizer, Lilly, Abott, A-Z, Jonhson & Johnson, Amgen) furent condamnés à payer pour les seules années 2009-2010, 13 milliards de dollars au Trésor fédéral américain pour de graves tromperies concernant une série de médicaments: Vioxx, Deroxat, Prozac, Avandia, Actos et Opren de Lily. Si fortes qu'elles semblent, ces pénalités sont pourtant faibles par rapport aux bénéfices annuels des grandes firmes et si peu dissuasives que la faculté de Droit de l'Université de Harvard propose de condamner, non les firmes, mais personnellement leurs dirigeants. Il y a aussi les indemnités infligées aux associations de patients: 5 milliards de dollars à MSD (Affaire Vioxx). Toutes les grandes firmes ont été condamnées un jour ou l'autre, GSK en tête avec ses 3 milliards d'amende.

Je crois que je vais jeter encore une fois mon Lipitor ou faire à nouveau une fenêtre thérapeutique (un arrêt pour observer)

Je lisLa vérité sur le cholestérol du professeur Philippe Even

Autre blog écrit antérieurement sur le sujet:

http://githibault.blogspot.ca/2012/09/lexercice-physique-est-plus-efficace.html

mercredi 28 août 2013

La Syrie, que faut-il faire?


Les belles paroles moralisatrices, les grands sauveteurs des nations! Les États-Unis ont utilisé des armes chimiques, le gaz orange, sur le Vietnam avec des séquelles horribles et que dire de la bombe atomique, un summum de cruauté, et sans jamais avoir été accusés de crime contre l'humanité. La France  a pratiqué l'enfumade en Algérie, en emmurant des Algériens dans des grottes et en les faisant délibérément mourir asphyxiés. «La peau d'un seul de mes tambours avait plus de prix que la vie de tous ces misérables». Ce n'est pas Bachar el-Assad qui parle mais bien un colonel français, Pélissier, lors de la guerre d'Algérie. La guerre nivelle la cruauté, c'est du pareil au même!

Drapés dans un discours moralisateur, ces pays oublient leurs propres bassesses et deviennent accusateurs... Cela m'horripile! Bachar el-Assad tue ignominieusement son peuple, les États-Unis l'ont fait avant eux. Il suffit de se rappeler la contagion de la petite vérole délibérément  propagée chez les Indiens par des couvertures infectées. C'était une guerre bactérienne.

Grattons un peu, on trouvera à coup sûr une ou des raisons hautement mercantiles derrière ce si généreux sursaut d'indignation. Beaucoup plus qu'une raison humanitaire, des analystes lucides parlent   d'une guerre pour un droit de passage de gazoducs vers la Turquie...

Je ne sais pas ce qu'il faut faire...Peut-être ne rien faire du tout, sinon une aide humanitaire pour tous les blessés, pour tous les affamés. Ce magnifique pays, vieux comme le monde, sera spolié de ses trésors comme en Afghanistan.... Je déteste les guerres. Il me semble que faire la guerre comme moyen de faire cesser une guerre, ce n'est pas heureux! Armer ses ennemis non plus! C'est une stratégie du chaos.

Les enjeux cachés empoisonnent l'air.

Il semble que les militants d'Al-Qaïda se soient infiltrés dans les rangs des rebelles et en auraient pris le contrôle. Les États-Unis et la France sont donc en train d'armer jusqu'aux dents les Islamites d'Al-Qaïda, leurs ennemis d'hier. Si on les aide financièrement et militairement, ce sont eux qui prendront d'une façon hautement prévisible le pouvoir et ce pays deviendra à son tour un pays gouverné par la charia... Quel gâchis!

Les enjeux cachés empoisonnent l'air!

mercredi 21 août 2013

Et si l'ordre mondial s'écroulait.....


Le président Clinton a quitté ses fonctions avec la conviction que la tâche principale de l'Amérique est de "créer" le monde où nous aimerions vivre en acceptant de ne plus être la seule super puissance mondiale et qu'il est temps de se partager la scène." C'est une proposition qui peut paraître pleine de bon sens. Quelle soit réalisable, c'est une autre question. 

En matière de pouvoir, de guerre et de paix, les règles et les institutions survivent rarement au déclin des puissances qui les ont établis. Quand les Américains perdront leur pouvoir, les institutions, les lois qu'ils soutiennent en perdront aussi. Ou alors, si l'histoire se répète, plus probablement, tout s'écroulera et nous entrerons dans un autre ordre - ou désordre -  mondial. Il se peut que nous découvrions alors, mais un peu tard, que les États-Unis étaient essentiels au maintien de l'ordre mondial et que l'alternative au pouvoir américain n'était pas la paix et l'harmonie mais le chaos et la catastrophe - ce qui a existé avant que le monde américain ne s'impose à nous  -

Ce déclin est-il inéluctable ou bien les États-Unis sont-ils en mesure de redresser la barre?

Super pro États-Unis!

Extraits tirés du livre de Robert Kagan, L'ordre mondial américain, les conséquences d'un déclin.

Si le pouvoir américain venait à décliner...


Si le pouvoir américain venait à décliner, quelles seraient les implications pour l'ordre international? Il est probable qu'aucune puissance unique ne pourrait remplacer les États-Unis comme super puissance; le monde n'a connu que deux ères unipolaires en deux mille ans. Il est plus probable qu'on reviendrait à un monde bipolaire. Le principal candidat à la succession des États-Unis dans le rôle de super puissance, c'est la Chine. Des Américains et des Chinois parlent déjà d'un monde du "G2" dans lequel Washington et Pékin mèneraient le bal. Certains prédisent que l'économie chinoise va dominer le monde dans les prochaines décennies.

Dans la fable du scorpion et la grenouille, la grenouille  accepte non sans résistance de traverser la rivière en portant sur son dos un scorpion parce qu'elle se convainc que le scorpion n'a aucun intérêt à la piquer et à mourir avec elle. Puis, au beau milieu de la rivière, le scorpion pique quand même la grenouille. "Pourquoi?" demande-t-elle, incrédule. Alors, le scorpion impavide dit: "Parce que je suis un scorpion. C'est plus fort que moi." La Chine et la Russie pourraient bien endommager ou ruiner l'ordre libéral économique non parce qu'ils en ont l'intention mais tout simplement parce que c'est plus fort qu'eux, parce que leur régime autocratique, totalitaire, est invinciblement porté à la main mise de l'État sur les richesses et au pouvoir qui en résulte. La Chine, en tant que puissance économique en pleine expansion a déjà fait pencher la balance en faveur de l'autoritarisme. L'ancien territoire de l'Union soviétique est une des régions les moins démocratiques au monde.

L'idée que le monde s'accorderait une transition calme et sans secousses, si l'on échangeait la configuration du pouvoir mondial, est un voeu pieux.

Je lis L'ordre mondial américain, les conséquences d'un déclin de Robert Kagan

lundi 19 août 2013

Nous vivons un âge d'or



Né à Athènes, Robert Kagan est un politicologue américain et docteur en histoire américaine

Nous tenons pour définitivement acquis beaucoup de ce que le monde nous offre aujourd'hui: l'extension des libertés, une prospérité mondiale sans précédent, l'absence des guerres entre les grandes puissances. En 1941, on ne comptait qu'une douzaine de démocraties dans le monde: il y en a aujourd'hui plus d'une centaine. Pendant quatre siècles, jusqu'en 1950, le produit intérieur brut a augmenté de 1% par an à l'échelle mondiale. Depuis 1950, il a augmenté de 4% par an, et des millions de gens ont été soustraits à la pauvreté. La première moitié du XXe siècle a connu, il est vrai, les deux guerres les plus meurtrières de l'histoire de l'humanité mais n'oublions pas, que dans les siècles antérieurs, les guerres étaient rien de moins qu'incessantes. Or depuis soixante ans, les grandes puissances ne se sont pas fait la guerre directement. On se souviendra de notre époque comme celle de la guerre qui n'a pas eu lieu entre les États-Unis et l'Union soviétique. Notre époque est un âge d'or.

Il se peut que le progrès dont nous cueillons les fruits ne soit pas le résultat d'une évolution inéluctable de l'espèce humaine. Peut-être n'est-il que la conséquence éphémère et sans doute unique, d'un concours de circonstance. Si les conditions actuelles venaient à changer, si le pouvoir changeait de mains, peut-être l'ordre du monde serait-il changé aussi... Il se pourrait bien que la démocratie se soit développée dans plus d'une centaine de pays  depuis 1950, non pas simplement parce que les gens aspirent à la démocratie mais parce que la nation la plus puissante du monde depuis 1950 est une démocratie! Et parce que la stupéfiante croissance mondiale des six dernières décennies est le reflet d'un ordre économique façonné par un pays qui ne jure que par l'économie de marché. Il se pourrait que la puissance colossale de cette nation ne soit pas étrangère au fait que nous connaissions une période de paix.

L'Histoire nous montre que les ordres mondiaux ne sont pas éternels. Après l'ascension vient la chute. Les institutions qu'ils ont érigées aux idéaux qui les ont guidés, leur chute est elle aussi, inscrite dans le temps. Dès lors que le pouvoir est conquis par des nations qui sont animées par d'autres intérêts et d'autres croyances tout change. Quand l'Empire romain s'effondra, l'ordre qu'il représentait s'est effondré aussi de même que tout le système économique, après quoi, il fallut des siècles pour tout reconstruire. La culture, les arts, les sciences et la technologie ont connu une longue régression.

La fin de l'ordre américain que nous connaissons actuellement aurait-il les mêmes funestes conséquences? Certains pensent que le déclin américain est déjà là et que, hélas, pour le meilleur et pour le pire, on n'y peut rien.

Ce qu'il faut garder à l'esprit c'est que ce ne sont pas ni les anges ni les dieux qui président aux destinées du monde.

Moi je garde à l'esprit qu'il y a eu pendant cet âge d'or, la guerre du Vietnam, du Kosovo, de l'Afghanistan, de l'Irak, le Rwanda... L'Amérique et l'Europe vivaient un âge d'or mais ailleurs, les guerres étaient  "incessantes". 

Je lis: L'ordre mondial américain, les conséquences d'un déclin de Robert Kagan

Images d'enfants heureux




Mathieu, William, un petit copain et Julia sous la lumière crue du soleil de Martha's Vineyard.
Instants émouvants des joies profondes de l'enfance.

dimanche 18 août 2013

Une femme mystique: Âisha al-Mannûbiyya


Saida Âisha est la sainte de l'islam la plus vénérée de Tunisie (1198-1299)

"Ravie de Dieu", dès son enfance Âisha passe pour folle et s'attire les railleries de son entourage. À douze ans, elle reçoit la visite d'Al-Kadir (l'initiateur de Moïse): "Tu es inscrite sur mes registres depuis 3 000 ans" s'entend-elle dire. Afin de couper court aux ragots, son père décide de la marier mais elle refuse et elle s'installe à Tunis. Elle nous est montrée tantôt entourée de disciples dans la mosquée de Saule ou en retraite pieuse errant parmi les tombes. Elle vivait de dons, dons qu'elle redistribuait aux plus pauvres. Elle mourut septuagénaire et fut enterrée à Tunis.



Âisha, surnommée Saida, la Dame

Âisha s'enorgueillit d'avoir appris le Coran de Dieu lui-même. Elle déclare avoir reçu de l'archange Mikâîle un breuvage paradisiaque grâce auquel lui ont été  octroyées neuf vertus. On ne lui connaît pas de maîtres, elle dit avoir été instruite directement au sein de Dieu. Auteur de nombreux prodiges, Âisha se proclame à plusieurs reprises "pôle des pôles" et vicaire de Dieu. Lors de ses transes mystiques, le coeur d'Âisha est "absent en Dieu", éteint à lui-même, éperdu dans la présence divine. Son hagiographie, gardé à travers les siècles, n'a jamais cessé d'être. Ses copies attestent de la grande dévotion portée à la sainte par les actes de donation dont certains ont été faits par les beys de Tunis.

Son culte qui perdure à ce jour s'est amplifié notamment depuis la disparition de sa tombe. Le mausolée de Âisha, situé à la Manouba, sur le site de la maison paternelle, a été totalement ravagé par le feu,  dans la nuit du seize octobre 2012, mausolée parmi les plus révérés du pays. Cette destruction est une immense perte pour la Tunisie.

Texte écrit par Nelly Amri

En exhumant un texte vieux de sept siècles, la démarche de l'auteure relève de la "quête de la trace" d'une  sainte parmi les hommes.

Je termine ces portraits de femmes mystiques avec celui d'Âisha. Je ne la connaissais pas quand je suis allée en Tunisie. Je la chercherai si j'y retourne.

Je lis Les femmes mystiques

mardi 13 août 2013

Une femme mystique: Marie de l'Incarnation


Marie Guyart, "Mère Marie de l'Incarnation", une mystique missionnaire en Nouvelle-France (1599-1672)

Elle naît à l'aube du "grand siècle des âmes" et elle en sera une représentante des plus emblématiques. À l'âge de sept ans, elle vit en songe Notre-Seigneur venir vers elle alors qu'elle jouait dans la cour de l'école. Il lui demande d'être à lui et elle répond "oui". Le secret de son existence s'est noué là. Ce songe eut l'effet de développer chez elle une "pente au bien" et une forte inclinaison au soucis de l'autre. Elle trouvera son accomplissement en terre canadienne. 

Vers l'âge de quatorze ans, Marie désire entrer à l'abbaye de Beaumont-les-Tours dont sa tante est abbesse. Ses parents refusent; elle finit par accepter d'épouser Claude Martin. Un an plus tard, elle donne naissance à un garçon, Claude. Elle devint veuve peu de temps après. Elle refuse de se remarier et s'installe avec son fils chez sa soeur. Elle gère avec talent l'entreprise de transport de son beau-frère.

En 1620, son existence est transformée par un événement connu d'elle seule. Elle se voit subitement plongée dans du sang, qu'elle identifie être celui du verbe incarné. Au même instant, il lui est donné de voir toutes les fautes commises par elle depuis son enfance et de se reconnaître coupable aussi de la mort du fils de Dieu. Dans ce même mouvement, elle expérimente la miséricorde de Dieu et dans un ravissement, elle est emportée dans l'amour même de Dieu. Cette expérience célèbre connue sous le nom de "vision du sang" la transforme  et la fait entrer dans une voie proprement mystique. Elle fait voeu de chasteté perpétuelle. Les grâces mystiques abondent dont plusieurs visions, entre autres celle où elle voit son coeur enchâssé dans celui de Jésus. Elle entre dans l'état d'épouse du Cantique des Cantiques. Après un discernement spirituel, elle adhère à la communauté des Ursulines. Suite à une troisième extase, elle expérimente une grande aisance à citer les Écritures et à les commenter. 

Elle fait un deuxième songe: "C'est le Canada que je t'ai fait voir. Va, et fais une maison à Jésus et à Marie." Étrange vouloir divin! Désormais, en son "centre" elle rejoint spirituellement par ses pensées et ses prières, jour et nuit, les Hurons du canada. Or, les pères Jésuites réclament des éducatrices pour les petites amérindiennes et les quelques filles françaises. Les Ursulines sont pressenties et Marie de l'Incarnation est choisie. Le 4 mai 1639, après avoir vu son fils pour la dernière fois, elle s'embarque pour la Nouvelle-France. Elle a quarante ans. La tâche est immense. Elle dirigea la construction d'un premier monastère puis sa reconstruction après l'incendie de 1650. Il lui faudra organiser la défense du couvent, qu'elle refuse de quitter au moment où les Iroquois menacent. Elle rédige le premier dictionnaire en algonquin et une correspondance de 13 000 lettres, plus de cent à son fils Claude devenu moine bénédictin. Sa docilité à l'Esprit l'a conduite par des voies insolites pour une mission insolite.  Elle est béatifiée par Jean-Paul II en 1980.

On croit de moins en moins maintenant que Jésus est le fils d'un Dieu; un remarquable initié, oui. Toutes ces visions célestes faisant état d'un Dieu anthropomorphique étaient-elles des illusions hystériques? Notre Ursuline était une femme exceptionnelle, douée, mystique et, cela, ce n'est pas une illusion.

Je lis Les femmes mystiques


lundi 12 août 2013

Une oeuvre du coeur....


C'est une oeuvre d'art

Joé et Marie-Héllène décapent avec entêtement la colle laissée par un vieux tapis arraché. Elle écrit: "Qui a dit qu'on ne pouvait pas décaper de la colle à tapis avec amour?"

Elle prépare la venue de Rosalie avec un coeur débordant d'affection et de créativité.

Trois femmes et une petite fille...

Je demeure un peu "sonnée" suite à la saga de l'hospitalisation de Guy. Samedi, mes deux filles Marie-Héllène et Frédérique-Anne se sont amenées avec de la bonne bouffe et en plus, une  surprise: la belle Michelle! La joie se propageait  en moi d'une façon  invasive et puissamment réconfortante.

Après le repas, nous  sommes allées retrouver Frédérique-Anne qui se reposait dans mon lit.  "Veux-tu me donner un petit massage, mom?" Elle s'est installée et j'ai massé doucement,  quasi pieusement, son beau  visage. Trois femmes et une petite fille dans mon lit, c'est du bonheur, des confidences, des rires... ça fait tellement de bien! Merci! merci!


Sylvain Cormier a écrit dans le Devoir un article sur le clan Mc Garrigle. Il parle de Kate dans ces termes: "Kate était une aventurière du quotidien, chroniqueuse de la vie de famille, chercheuse de trésors dans le coeur de ses enfants, spéléologue des relations humaines..." Il me semble que je me reconnais un peu dans cette description si lumineuse.

Analyse de ta transverbération de Sainte Thérèse d'Avila


L'extase de sainte Thérèse, Bernini (1652), chapelle Cornaro, Rome




Le XXe siècle, et l'avènement de la psychanalyse a favorisé  analyses et commentaires sur les extases de sainte Thérèse d'Avila. En voici quelques uns:

Le neurologue  Gilles Huberfeld, spécialiste en épileptologie est d'avis que les extases de sainte Thérèse s'apparenteraient en réalité à des crises épileptiques impliquant le lobe temporal droit. Cependant cette hypothèse n'explique pas la blessure observée au coeur lors de son autopsie suite à son décès, et identifiée comme étant liée à sa transverbération.

D'autres critiques modernes expliquent les expériences religieuses proches de la syncope comme des phénomènes psychologiques qui relèvent de l'orgasme plutôt que comme des phénomènes spirituels. La sculpture de Bernini, avec la position du corps de sainte Thérèse et l'expression de son visage, bras et pied  abandonnés ont conduit certains à les expliquer comme le signe d'un moment d'extase sexuelle.

"Elle jouit Thérèse! disait Lacan. Notre époque, excessivement marquée par Freud et la psychanalyse trop souvent démocratisée, pour ne pas dire de bazar, ne peut voir, ici qu'une extase tout ce qu'il y a de plus physique. Il s'agit cependant d'une extase mystique."

Jouir de la chair, jouir d'amour ou jouir de Dieu n'est en fait que le désir ultime de jouir à l'infini d'une contemplation intime, profonde et éternelle, de la splendeur de l'autre, d'Amant à Amante. Katrin Alexandre

Je lis Les femmes mystiques

Quand j'ai lu l'histoire de sa vie, j'ai été profondément touchée. J'ai eu la conscience étrange d'avoir monté une marche symbolique dans une  évolution spirituelle naissante.


dimanche 11 août 2013

Une femme mystique: Thérèse d'Avila


Sainte Thérèse d'Avila (1515-1582)

Son père d'ascendance juive était un chrétien fervent, sa mère mourut à 24 ans, laissant la jeune Thérèse dans un grand désespoir qu'elle confia à la Vierge Marie. Enfant, Thérèse s'enfuit avec son jeune frère Rodrigo pour aller chercher le martyre chez les Maures. Le 2 novembre, elle entre, contre la volonté de son père, à l'Incarnation, le monastère carmélite d'Avila. Tourmentée spirituellement pendant plusieurs années, Thérèse a alors une vision du Christ. "Je le vis avec les yeux de l'âme beaucoup plus clairement que je n'aurais pu le voir avec les yeux du corps." Désormais, le Christ l'accompagne et oriente sa vie. Des grâces mystiques ne lui laissent pas de répit: visions, paroles intérieures, transports, lévitation, vols de l'esprit, faveurs de toutes sortes.


La transverbération, sculpture en marbre de Bernini



L'extase de Thérèse (détail)

En avril 1560, Thérèse reçoit la grâce de la transverbération: "J'aperçois un ange auprès de moi... je voyais entre les mains de l'ange un long dard qui était d'or, et dont la pointe de fer portait à son extrémité un peu de feu. Parfois, il me passait le dard au travers du coeur et l'enfonçait jusqu'aux entrailles. Quand il le retirait, on aurait dit que le fer les emportait après lui et je restais tout embrasée du plus ardent amour de Dieu".

En 1562, elle fonde hors des murs d'Avila, le monastère de San José. Sa rencontre avec Jean de la Croix permet les débuts de la branche masculine des Carmes déchaussés. Malgré les obstacles rencontrés, elle poursuit avec ferveur la fondation de dix-sept monastères. Pour atteindre ses objectifs, elle n'hésite pas à remuer ciel et terre, à tel point que le cardinal Felipe la qualifie de "femme inquiète et vagabonde". La présence de Dieu ne l'abandonne plus. Elle est comme crucifiée entre ciel et terre, en proie à la souffrance, on dirait les affres de la mort. Mais cette souffrance est accompagnée d'un si grand bonheur. C'est un martyre à la fois délicieux et cruel. Elle reçoit la grâce des fiançailles et du mariage spirituels. Le dimanche des Rameaux, Thérèse a une extase violente, sa bouche se remplit de sang. Elle redoute les extases publiques: "Cela me torturait au point de jeter mon âme dans un trouble profond; j'aurais préféré me laisser enterrée vivante".

Le parcours de Thérèse s'achève dans le repos et la quiétude, les phénomènes extraordinaires cessent: "Mon âme jouit d'une paix ineffable". Ses reliques sont dispersées dans toute l'Espagne. Canonisée par Grégoire XV en 1622, sainte Thérèse est déclarée patronne d'Espagne et docteure de l'Église par le pape Paul VI en 1970.

Texte écrit par Bernard Sesé, tiré du livre Femmes mystiques


dimanche 4 août 2013

Ma mère, Thérèse



Maman, 92 ans, magnifique femme!

Après trois mois d'hospitalisation, pour réparer fissures et fractures, maman retourne dans ses appartements à l'Ermitage, avec soins assistés. Ce qui l'afflige le plus, c'est ce nouvel état de dépendance avec lequel elle devra désormais composer. C'est une battante, elle saura faire! Bienvenue dans ta maison, maman! Enfin!

Mon père, Germain




Un champ de moutarde

Je rêvais. Des notes de guitare s'égrenaient et une belle voix de femme chantait une chanson douce:
 " J'étais une petite fille et je regardais mon père marcher dans un champ de moutarde..."  


J'étais partie prenante de ce rêve. J'écoutais cette chanson avec un grand intérêt et je voyais le père marcher lentement dans le champ de moutarde, il s'éloignait.

Et brusquement, un sanglot venu du fond de mon histoire de vie, m'est monté à la gorge. Court instant d'un manque ravivé. J'étais dans la nostalgie de la présence de mon père, en plein rêve! J'ai frissonné et tout doucement ce frisson m'a ramenée au seuil de l'éveil. Je me suis collée contre Guy qui dormait à mes côtés et paisiblement, je me suis rendormie. Il y a deux jours, c'était l' anniversaire de naissance de mon père... il aurait eu 98 ans!

Un champ de moutarde!!!! 

vendredi 2 août 2013

Une femme mystique: Maria Sabina Magdalena Garcia



Maria Sabina Magdalena Garcia (1894-1985), une chamane, une guérisseuse, originaire du sud du Mexique, Huautla

Maria Sabina est une guérisseuse qui témoigne d'une forme de mystique "archaïque". Initiée aux croyances et aux pratiques de communication avec les esprits, elle est une intermédiaire entre le monde humain et l'autre monde. Considérant que les maladies du corps sont liées à celles de l'âme, elle possède le pouvoir de guérir, puisant la solution dans les dimensions intermédiaires. "Il y a un monde au-delà du nôtre, un monde qui est lointain, proche, invisible, et c'est là que Dieu vit, que vivent la mort, les esprits, les saints. Un monde où chaque chose est déjà arrivée et où tout est connu. Les champignons sacrés me mènent dans ce monde. Ils me parlent d'une manière que je comprends. Je demande et ils me répondent." dit-elle à Joan Halifax.

Maria Sabina est la première chamane à initier des Occidentaux aux cérémonies du vélada, véritable rite de purification et de communion avec le sacré pendant lequel chaque participant consomme des hallucinogènes dans le but de libérer son esprit. De nombreux adeptes américains, scientifiques ou autres, Bob Dylan, John Lennon la rejoignent  dans le courant des années 1960. Pratique qui s'estompe quand elle prend conscience de l'utilisation profane et hédoniste et du manque de respect envers les buts sacrés et traditionnels de ces rituels. Elle sentait la force des champignons diminuer dans son esprit. Avec la venue de l'homme blanc, se perdait le sens profond et la pureté des champignons.



Maria Sabina Garcia reste un exemple contemporain et authentique de femme chamane.

Je lis Les femmes mystiques, Audrey Fella

Une femme mystique: Catherine Golovine



 

Catherine Golovine (1950-...) Danseuse, chorégraphe, professeur de danses sacrées


Après avoir dansé le Magnificat, Catherine Golovine ressent la nécessité d'établir un pont entre son art qui est très exigeant, et sa quête de l'essentiel, qui est dès lors le moteur de sa vie. Catherine et son mari vont se laisser évangéliser par la danse. "Servir Dieu à travers des gestes essentiels pour rendre grâce." Commence alors une profonde transformation de tout son être. Transcendée par la foi, elle imagine une gestuelle de prière contemplative toute entière destinée à Dieu. Le couple crée en 1976, le Théâtre de la danse et les Rencontres internationales de danse, deux activités désormais célèbres pour leurs créations artistiques sacrées. 

Considérés tous les deux par l'évêque d'Avignon comme des prêtres laïques, ils ne cessent d'introduire la danse  au coeur de la vie spirituelle. Pour cela, Catherine s'inspire des danses sacrées de l'Extrême-Orient. En 1991, elle crée avec le pianiste Francis Vidil un spectacle de danse sacrée dans la cathédrale Notre-Dame de Paris pour le bicentenaire de la mort de Mozart. Puis, le Te Deum pour sept danseurs d'Hector Berlioz sous le parrainage de Maurice Béjart. Catherine est filmée par Marie-Hélène Rebois dans les monastères des Clarisses lors du spectacle d'une oeuvre créée pour le huit centième anniversaire de sainte Claire d'Assise. Catherine Golovine continuera à faire danser les religieuses exprimant ainsi leur vie contemplative.

"Il y a en Christ toute la beauté du monde, la danse n'est-elle pas harmonie?"

La richesse et la créativité des arts sacrés m'étonnent et m'émeuvent totalement. Et je repense à ce passage biblique où le roi David, à l'entrée de  l'Arche d'Alliance dans Jérusalem, se dévêtit et se mit à danser, à tournoyer de toutes ses forces devant l'Éternel.

danse de David
David dansant près de l'arche

Je lis Femmes mystiques sous la direction d'Audrey Fella. Extrait du texte de Élisabeth Zana

jeudi 1 août 2013

Une femme mystique: Hypathie d'Alexandrie


Hypathie d'Alexandrie (370-415). C'est une mathématicienne, une philosophe, une martyre...

Hypathie est la fille de Théon, dernier directeur du musée de la bibliothèque d'Alexandrie. Initiée par son père aux mathématiques et à l'astronomie, elle étudie aussi la philosophie. "Elle avait bénéficié d'une formation si complète qu'elle surpassait tous les philosophes de son temps." dit d'elle Socrate le Scolastique. Dotée d'un génie supérieur à celui de son père, Hypathie enseignait les disciplines scientifiques, et outre Platon et Aristote, les oeuvres de n'importe quel autre philosophe. Savante et sage, Hypathie était aussi très belle, et brillait d'une étonnante assurance au sein d'un milieu d'hommes. Aucun de ses travaux ne nous sont parvenus, en particulier à cause de l'incendie de la bibliothèque d'Alexandrie. " La fière franchise, qu'elle avait du fait de son éducation, faisait qu'elle affrontait en face à face, avec sang-froid, même les gouvernants. On la craignait." (Damacius)

Fut-elle victime d'une sombre machination en raison des dissensions entre le gouverneur Oreste et l'Évêque Cyrille? Est-ce Cyrille qui, passant un jour devant la maison d'Hypathie où il y avait foule, céda à la jalousie devant sa célébrité,  une femme libre et sans religion !!! et commanda son meurtre? Est-ce pour avoir pratiqué la magie et théurgie et s'être intéressée aux astrolabes et instruments de musique qu'elle suscita la colère des chrétiens? Jean, l'évêque de Nikiou (Basse-Égypte) l'accusa même de pratiques sataniques.

Déshabillée, tuée à coups de tesson , démembrée puis brûlée selon les uns, traînée derrière un char jusqu'à ce que mort s'en suive selon les autres, Hypathie est entrée dans la légende des vierges martyres. Sort cruel! Son martyre fut associé à celui d'une icône de la féminité outragée par l'extrémisme religieux et la jalousie des hommes de pouvoir.  Hypathie continue de briller dans les esprits. Elle fut une martyre païenne.

Extrait d'un texte écrit par Françoise Bonardel

Cette fin de vie d'une femme si brillante, intellectuelle et philosophe me bouleverse totalement. Assassinée par un évêque chrétien mysogine! J'ai un frisson d'âme.


Voir le film Agora (2009)  d'Alejandro Amenabar sur la vie d'Hypathia. Le film reçut sept prix en Espagne dont le prix Goya pour le meilleur scénario original. Voici l'adresse d'un blog antérieur fait sur ce personnage magnifique: L'assassinat d'Hypathie d'Alexandrie:

http://www.blogger.com/blogger.g?blogID=3318240687071079208#editor/target=post;postID=8118104050201960708