lundi 30 décembre 2013

L'anticythère, une découverte incomparable



L'anticythère

En 2006, de nombreux articles paraissaient dans la presse sur le mécanisme d'anticythère le décrivant comme l'un des objets les plus extraordinaires et mystérieux réalisé dans l'Antiquité. Les journaux titraient: "Découverte d'un ordinateur datant de 2000 ans. Ce qui n'est pas totalement faux. Cette machine a pourtant été découverte en 1900 et on ne connait aucun autre appareil approchant ce degré de complexité construit avant le XVe siècle, date des premières horloges mécaniques.

Le mécanisme a été trouvé dans l'épave d'un navire romain à 60 m. sous l'eau, au large des côtes de la petite Île d'Anticythère en mer Égée. Des pêcheurs d'éponge grecs qui rentraient chez eux, ont été forcés de s'arrêter sur l'ile en raison du mauvais temps. Profitant de cette escale, ils plongent au large des côtes lorsqu'ils trébuchent sur ce qu'ils décrivent comme étant des corps gisant sur le fond océanique. C'étaient des statues grecques en marbre et en bronze. Il semble que le navire transportait des oeuvres d'art vers Rome, sans qu'on sache si elles avaient été achetées ou pillées.

Il y avait aussi un étrange objet... un bloc incrusté de bronze et de bois, ce qui ne fit guère impression sur le personnel du musée. On raconte qu'au bout de quelques mois, le bloc se serait fendu tout seul, la corrosion du bronze ayant attaqué le milieu du bloc, exposant alors un certain nombre de rouages et d'engrenages ainsi que quelques lettres grecques. L'importance de la découverte ne faisait plus aucun doute et des mesures de conservation ont été prises. 

Ce n'est que dans les années 1950, qu'un scientifique britannique, Derek de Solla Price, fit des radiographies des fragments afin de déterminer sa véritable raison d'être. L'objet était composé de plus de 30 roues dentées dont certaines différentielles, ce qui permettait à ce mécanisme de tourner dans les deux sens. Il était actionné par une manivelle permettant d'entrer une date donnée ce qui entraînait les rouages et les engrenages et faisait tourner les aiguilles pour indiquer la position du Soleil, la Lune et les planètes sur un certain nombre de cadrans différents, sorte d'ordinateur manuel.


Des scientifiques reprennent les travaux de Price. C'est la raison pour laquelle, en 2006, les journaux ont ressorti le mécanisme d'anticythère des tiroirs. On a jamais rien trouvé de comparable. Michael Edmunds a écrit: "Cet appareil est tout simplement extraordinaire. Le desing est très beau, l'astronomie est tout à fait exacte. Quelqu'un a fabriqué ce mécanisme  à engrenages 1500 ans avant tout le monde." 


Reconstruction de l'anticythère

L'anticythère n'aurait pas été de grand secours comme aide à la navigation car il était  en bronze et, s'il avait été emmené en mer pendant longtemps, le métal se serait rapidement corrodé, le rendant inutile. S'il avait été réalisé pour des démonstrations publiques d'astronomie, le mécanisme qui fait la taille d'une boîte à chaussures, n'aurait pas été visible à une certaine distance. Surtout que certains cadrans sont à l'arrière. Le mécanisme demeure un exemple unique de l'ingénierie et de l'érudition de l'Antiquité. Jusqu'à sa découverte, rien ne nous avait laissé supposer que les Grecs de l'Antiquité pouvaient réaliser une telle chose. Le mystère persiste!

Je lis Les plus grands mystères de l'histoire de l'humanité, Bill Price

samedi 28 décembre 2013

Les hommes de Néandertal ont transmis leurs gènes à l'homme moderne




Une partie de l'A.D.N. des hommes de Néandertal vit en nous. Au moment où l'homme moderne arrive en Europe, il y a 40 000 ans environ, le continent abrite depuis très longtemps  une autre espèce d' homidés très proche de nous. Les hommes de Néandertal sont arrivés là depuis plusieurs centaines de millénaires avant nous.

Selon les preuves archéologiques, les deux espèces partageaient le même espace sans se mélanger, pendant environ 10 000 ans, jusqu'à ce que Néandertal s'éteigne. La dernière trace que nous avons retrouvée de lui prouve qu'il a occupé des grottes sur le rocher de Gibraltar, il y a environ 28 000 années. Dernier refuge d'une espèce condamnée qui, après sa disparition a fait de nous les seuls occupants de la région et la dernière espèce survivante de notre genre.

Depuis sa description au XIXe siècle, après la découverte d'un squelette dans la vallée de Neander, en Allemagne, on le présente comme l'archétype de l'homme des cavernes, hirsute, lent, massue à la main, "pas aussi humain que nous". Les recherches archéologique ont prouvé le contraire. Les Néandertaliens vivaient en petits groupes familiaux reposant sur  l'union monogame entre les hommes et les femmes. Ils prenaient soin des personnes malades et blessées et enterraient les morts d'une manière semblable à la nôtre. Ils étaient des chasseurs et des artisans accomplis, ils communiquaient avec une forme précoce de langage. Ils étaient aussi des artistes. Les peintures rupestres d'une embarcation à voile découverte dans une grotte  en Espagne date environ de 42 000 ans avant que  les humains modernes n'arrivent dans la région. La peinture a été faite par un homme de Néandertal. Nous nous ressemblons en fait énormément. 

Il était plus petit et plus robuste, donc mieux adapté au climat froid de l'Europe. Notre corps mince et moins musclé a évolué dans la chaleur de la savane africaine. Le Néandertalien était moins sociable que nous, il n'avait que peu de contact avec d'autres personnes en dehors de leur cercle immédiat. Et leur conception de l'outil n' a que peu évolué  pendant des centaines de millénaires.

Il semble que les Néandertaliens se soient séparés de la ligne de l'évolution qui allait conduire à l'homme moderne, il y a 400 000 ans. L'ancêtre commun serait Homo Heidelbergensis, lui-même un ancêtre d'Homo Erectus, le premier hominidé à marcher debout.

Une cause possible du déclin de l'homme de Néandertal est l'arrivée de l'homme moderne, soit par la confrontation directe, la concurrence pour les mêmes ressources ou la propagation de maladies. 

Une autre cause possible: des vagues de froid intense survenue très brusquement où la toundra et la steppe ont remplacé les forêts en est probablement la cause, leurs outils n'étant plus adaptés, les survivants ont été contraints de se réfugier dans le sud de l'Espagne. Le climat s'étant réchauffé, cela permit aux hommes modernes de se développer sur le terroir occupé autrefois par les Néandertaliens. 

Une troisième possibilité est apparue en 2010, lorsque la séquence de l'A.D.N. de Néandertal a été publiée. Les résultats ont révélé que tous les hommes modernes, à l'exception des individus originaires d'Afrique, ont directement hérité entre 1 et 4% de leurs gènes des Néandertaliens. Des croisements ont eu lieu et ont produit une descendance viable. L'homme de Néandertal n'a pas complètement disparu, il vit en nous, car il fait partie de nous.

Je lis Les plus grands mystère de l'histoire de l'humanité, Bill Price

jeudi 26 décembre 2013

L'art selon François Cheng



François Cheng

Max Jacob dans Derniers poèmes, évoque la nostalgie de François Cheng :" Il suffit d'un enfant de cinq ans, en sa blouse bleue pâle, dessinant sur un album pour qu'une porte s'ouvrit dans la lumière, pour que le château se rebâtit et que l'ocre de la colline se couvrit de fleurs." 

Une création artistique se doit d'exprimer la part violente, souffrante de la vie, ainsi que toutes les formes de perversion que cette vie engendre, mais elle a également pour tâche de continuer à révéler ce que l'univers vivant recèle de beauté virtuelle. Chaque artiste devrait, en somme,  accomplir la mission assignée par Dante: explorer à la fois l'enfer et le paradis.

L'art authentique est en soi une conquête de l'esprit; il élève l'homme à la dignité du Créateur, fait jaillir des ténèbres du destin un éclair d'émotion et de jouissance mémorable, une lueur de passion et de compassion partageable.

 Extrait du livre de Max Jacob, Derniers Poèmes

Comment ne pas penser aux strophes célèbres de Beaudelaire, extrait de Phare


Phare

C'est un cri répété par mille sentinelles
Un ordre renvoyé par mille porte-voix
C'est un phare allumé sur mille citadelles
Un appel de chasseurs perdus dans les grands bois!

Car c'est vraiment, Seigneur, le meilleur témoignage
Que nous puissions donner de notre dignité 
Que cet ardent sanglot qui roule d'âge en âge
Et vient mourir au bord de votre éternité.

J'aime tant ce poème....

Le mystère du regard



François Cheng est né en 1929, en Chine. Écrivain, poète et calligraphe, il devient le premier asiatique à devenir membre de l'Académie française en 2002 et Officier de la légion d'Honneur en 2009


D'où vient la beauté d'un regard? Le regard est plus que les yeux. Ne dit-on pas que les yeux sont "la fenêtre de l'âme"? La beauté du regard vient d'une lumière qui sourd de la profondeur de l'Être. "La beauté résulte de la rencontre de l'intériorité d'un être et de la splendeur du cosmos" St-Augustin.

J'aime à rappeler une remarque d'Henri Maldiney selon laquelle le substantif  regard  et le verbe  regarder sont deux mots que bien des langues peuvent envier aux Français. La combinaison de re et garder est riche de connotations. Elle évoque la reprise et le renouveau de quelque chose qui a été gardé et qui demande à chaque occasion, à être développé en tant que devenir. Ajoutons que le regard comporte en outre l'idée d'égard, il suscite l'être qui regarde à un engagement plus profond.

Le bouddhisme a introduit la notion de l'oeil de sapience ou du troisième oeil. Le regard que produit cet oeil relève plus que la conscience du sujet, de la conscience universelle qui l'habite, et qu'il ne peut acquérir qu'après l'expérience de la vacuité.

Julien Green note dans son Journal: "Je me demande si dans tout l'Univers il y a quelque chose qui puisse s'y comparer. Quelle fleur? quel Océan? Le chef d'oeuvre de la création est peut-être là. La mer n'est pas plus profonde. Dans ce minuscule gouffre transparaît ce qu'il y a de plus mystérieux au monde, une âme, et pas une âme n'est parfaitement semblable à une autre."

"Quand l'âme quitte le corps, la beauté, le charme, l'éclat ne demeurent plus en lui: d'évidence, toute la beauté se manifestait par le corps, alors qu'elle appartenait à l'âme." Le Maître Soufi Sultan Valad

J'ai connu cette profondeur mystérieuse du regard dans les yeux d'une petite fille. Il s'agissait d'amour! Extrait du bloque, "Alice, ma toute première" :

"Ses beaux yeux sont si noirs qu'une fois, j'ai eu la sensation étrange de plonger dans l'infini du cosmos. Dans une profondeur qui fait frissonner. Il y a un diamant caché dans ce petit coeur. Marie-Héllène comprend mes paroles, elle a déjà connu aussi, cette émotion de vertige dans un moment fugace de transparence. Moment inoubliable, rare, difficile à capter, où une petite fille, sans filtre, laisse vibrer l'intensité de son âme."

Je lis  Cinq méditations sur la beauté de François Cheng

vendredi 20 décembre 2013

Pierre Teilhard de Chardin, gentilhomme de Dieu...


Pierre Teilhard de Chardin

Non pas répugnante mais féroce, la persécution dont Teilhard de Chardin fut victime. En 1926, sous Pie XI, Teilhard de Chardin se voit chassé de sa chaire à l'Institut catholique de Paris. En 1927, la censure romaine refuse l'imprimatur à son MILIEU DIVIN. En 1933, toute activité publique lui est interdite à Paris. En 1939, défense lui fut faite de publier L'ÉNERGIE HUMAINE, sous Pie XII, son grand livre, LE PHÉNOMÈNE HUMAIN ne put voir le jour et, en 1948, interdiction lui est  signifiée de  ne traiter d'aucun sujet philosophique. En 1948, pressenti pour être reçu au Collège de France, il reçoit l'ordre de ne pas présenter sa candidature. En 1949, Rome censure son Groupe Zoologique Humain, inconciliable avec ce que Pie XII se prépare à soutenir en 1950, dans son encyclique HUMANI GENERIS sur Adam, premier homme sans prédécesseur, tout semblable à ce qu'est l'homme d'aujourd'hui. En 1954, il revient pour deux mois à Paris, mais il doit quitter la ville six semaines avant le terme prévu, en raison d'une campagne  menée contre lui. Rome lui défend, l'année suivante de prendre part au congrès international de Paléontologie. C'est cette même année qu'il meurt à New York. Une seule personne accompagna son corps au cimetière. Preuve d'une déloyauté indécente de la part des autorités religieuses ecclésiastiques. "J'aimerais mourir le jour de la Résurrection" avait-il dit. Il est mort le Jour de Pâques 1955.

"Seigneur, parce que, de tout l'instinct, et par toutes les chances de ma vie, je n'ai jamais cessé de vous chercher et de vous placer au coeur de la Matière universelle, c'est dans un éblouissement d'une universelle Transparence et d'un  universel Embrasement que j'aurai la joie de fermer les yeux". (Le coeur de la Matière, 1950)

Tiré du livre Malheureuse Église, de Henri Guillemin

Je me recueille,  et je me laisse envahir par le mystère de cette vie si riche et je laisse mon esprit courir après sa traînée lumineuse qui brille encore en rémanence dans le ciel de notre pauvre humanité. 

Teilhard de Chardin, je vous aime! Vous êtes vivant!


Teilhard de Chardin, l'immensité d'une vie




Père Teilhard de Chardin, jésuite, géologue, paléontologue (1875-1955)

Teilhard de Chardin se trouvait en exil à New-York, où, le 10 avril 1955, une ultime crise cardiaque le terrassait. Jésuite, il était demeuré dans dans la Compagnie sans défaillir observant jusqu'au terme et dans l'éloignement la consigne du silence qui le frappa, puisqu'il avait l'interdiction de publier. Il avait noté dans son carnet intime ces mots de Bernanos: "Toutes les aventures spirituelles sont un calvaire". Mais l'aventure spirituelle qui fut la sienne lui permit de comprendre celle de l'humanité. Il a mêlé à un point d'indissolubilité, vie mystique et recherche de la science.

En décembre 1914, Pierre de Chardin est mobilisé comme brancardier, son régiment sera décimé. Au médecin-major qui lui transmet une proposition au grade d'aumônier-capitaine, le brancardier répond: "Je suis plus utile dans le rang, j'y fais plus de bien. Faites-moi la faveur de me laisser au milieu des hommes". Il quitte le poste de secours pour servir aux tranchées de première ligne. Modèle de bravoure, d'abnégation et de sang-froid, il est fait chevalier de la Légion d'honneur.

Le père Teilhard de Chardin écrit le livre: "La puissance spirituelle de la matière". Il est envoyé, par le Museum, pour participer à une mission paléontologique française, en Chine. "Je n'ai ni pain ni vin ni autel, je m'élèverai par-dessus les symboles jusqu'à la pure majesté du Réel, et je vous offrirai, moi, votre prêtre, sur l'autel de la Terre entière, le travail et la peine du monde. Je les évoque, ceux qui viennent et ceux qui s'en vont; ceux-là surtout qui, croient au progrès des choses et qui poursuivront passionnément la lumière".

Le géologue rentre en France. Dans la nécessité d'accorder avec le dogme du péché originel les nouvelles découvertes concernant les origines humaines, il élabore sur ce thème quelques pages destinées aux théologiens.  Les feuilles allèrent jusqu'à Rome... ce fut l'exil. En Somalie, en Abyssinie, en Chine jusqu'aux cités mortes du Gobi, puis l'Inde et Java.  Il avait cinquante ans. Puis soixante ans et toujours tenu loin de l'Église.

Le père Teilhard de Chardin est atteint d'un infarctus du myocarde : "À ce moment dernier, où je sentirai que je m'échappe à moi-même, absolument passif aux mains des grandes forces inconnues qui m'ont formé, à toutes ces heures sombres, donnez-moi, Mon Dieu, de comprendre que c'est vous qui écartez douloureusement les fibres de mon être pour pénétrer jusqu'aux moelles de ma substance, pour m'emporter en Vous".

J'aime tellement cet être humain. J'ai une admiration émue pour l'homme spirituel, le paléontologue, l'homme de science. Je reste pantoise, sans voix devant le mystère de sa  fidélité envers  une Église qui l'a  fait tant souffrir.

mardi 17 décembre 2013

Vonnegut désespérément déçu


Kurt Vonnegut

"Il y a bien des années, j'estimais encore que nous pourrions devenir l'Amérique humaine et raisonnable dont tant de gens de ma génération avaient rêvée. Je sais maintenant que nous n'avons pas une foutu chance d'y arriver. Parce que le pouvoir nous corrompt et qu'un pouvoir absolu nous corrompt absolument. Les êtres humains sont des chimpanzés que le pouvoir soûle et rend fou.

Savez-vous comment nous avons véritablement pris Mexico pendant la guerre du Mexique? Pourquoi ce n'est pas un jour férié dans notre pays? Et pourquoi le visage de James Polk, notre président de l'époque, n'est pas sculpté sur le mont Rushmore? Ce qui rendait le Mexique maléfique dans les années 1860, bien avant notre guerre de Sécession, c'était que l'esclavage y était illégal. Vous vous souvenez d'Alamo? C'est avec cette guerre que nous nous sommes emparés de la Californie et d'une quantité de gens et de propriétés. Et nous l'avons fait comme si le massacre de soldats mexicains - qui ne faisaient que défendre leur patrie - ne relevait pas du meurtre. Quoi d'autres en dehors de la Californie? Hé bien, le Texas, l'Utah, le Nevada, l'Arizona, et certaines parties du Nouveau-Mexique, du Colorado et du Wyoming".


Kurt Vonnegut reprend la plume pour crier son indignation et son désarroi. Il ne reconnait plus son Amérique qui court au désastre sous l'égide de ceux qu'il nomme les psychopathes de Washington. Ce livre a été écrit pendant la présidence de George W. Bush.

Extrait du livre Un homme sans patrie de Kurt Vonnegut

Vonnegut désespéré...


Kurt Vonnegut

Peu importe la corruption, l'avidité, la cruauté de notre gouvernement, de nos  institutions religieuses et caritatives, la musique sera toujours merveilleuse. Si je devais mourir que ceci soit mon épitaphe: "La seule preuve de l'existence de Dieu, c'est la musique". La musique rend pratiquement toute personne plus amoureuse de la vie; même les fanfares militaires me mettent toujours de bonne humeur. J'aime Strauss et Mozart, mais le cadeau le plus inestimable que les Noirs américains ont donné au monde quand ils étaient encore esclaves est si grand qu'il est à présent la seule raison pour laquelle tant d'étrangers nous aiment encore un petit peu. Le remède à l'épidémie de dépression dans le monde entier est un cadeau qui a pour nom le blues - le jazz, le swing, le be-bop, Elvis Presley, les Beatles, les Stones, le rock'n'roll etc... dérivent du blues.

Le merveilleux écrivain Albert Murray,  historien de jazz a raconté que pendant la période de l'esclavage dans ce pays - une atrocité dont nous ne pourrons jamais complètement nous remettre - le taux de suicide parmi les propriétaires d'esclaves était bien plus élevé que parmi les esclaves eux-mêmes. Les Noirs pouvaient chasser le Vieux Père Suicide en jouant et chantant le blues. Les étrangers nous aiment pour notre jazz et ils nous détestent à cause de notre arrogance. 

Nos enfants se retrouvent héritiers de l'histoire incroyablement récente de l'esclavage, d'une épidémie de sida, des sous-marins atomiques sommeillant au fond des fjords, avec des équipements prêts à transformer des quantités industrielles d'hommes, de femmes et d'enfants en déchets radioactifs et en engrais azotés. Le monde vit au jour le jour.


Requiem

Lorsque le dernier être vivant
sera mort à cause de nous
comme il sera poétique
d'entendre la terre dire, 
d'une voix s'élevant peut-être
du fond du Grand Canyon:
"Tout est accompli.
Les gens ne se plaisaient pas ici..."

Kurt Vonnegut

Je lis Un homme sans patrie  de Kurt Vonnegut



Et me voilà en train de dériver et de penser que si tout est foutu, que le dernier des humains quitte la Terre en jouant sur son harmonica un air de blues nostalgiquement mystique! ...  Fin! 

lundi 16 décembre 2013

Kurt Vonnegut



Kurt Vonnegut

Vonnegut est d'origine allemande, il fit  ses études aux États-Unis. Engagé par l'Armée américaine pendant la Deuxième Guerre Mondiale, il fut fait prisonnier par l'Armée allemande et fut l'un des sept
Américains rescapés lors de l'attaque de Dresde en 1945.

Je lis: Un homme sans patrie de Kurt Vonnegut


Si le Christ n'avait pas prononcé son Sermon sur la Montagne, message de miséricorde et de pitié, je ne voudrais pas de ma condition d'être humain. J'aimerais autant être un serpent à sonnette. Ce qui donne presque de la valeur au fait d'être en vie, en dehors de la musique, c'est tous les saints que j'ai rencontrés et qui se trouvent un peu partout. Par saint, j'entends toute personne qui se comporte de manière honorable dans une société parfaitement avilissante. George Bernard Shaw disait à propos de la planète Terre: "Je ne sais pas s'il y a des hommes sur la Lune, mais s'il y en a, ils doivent se servir de la Terre comme d'un asile de fous".

Je côtoie aussi des  saints et saintes:
Etty Hillesum, Albert Camus, David Suzuki, Hubert Reeves, Simone Weil, Caroline Coulombe, soeur Thérèse Thibault, Nelson Mandela, Oriah Mountain Dreamer, Thérèse d'Avila, Mathieu Lollis. Teilhard de Chardin, Marie-Héllène Thibault, Van Gogh et... j'ajoute Christiane Singer.

Je crois que le système immunitaire de la planète essaie de se débarrasser de nous avec le sida et les nouvelles menaces de la grippe et de la tuberculose. Je pense que la planète devrait se débarrasser de nous. Nous sommes vraiment d'horribles animaux. "Cette bonne Terre nous aurions pu la sauver, mais nous étions trop minables et paresseux".

Le seul reproche que mon oncle Alex faisait aux humains était qu'ils remarquaient à peine qu'il leur arrivait d'être heureux. Lorsque nous vivions une limonade sous un pommier pendant l'été, mon oncle soudain s'exclamait:" Si ce n'est pas pas un bon moment ça, alors je ne sais vraiment pas ce que c'est".

Ces paroles m'émeuvent parce que je fais la même chose avec mes enfants quand nous sommes attablés, réunis et heureux. Nous faisons silence et je dis: " Mes enfants soyez attentifs, le bonheur passe"... Et un moment de grâce se cristallise.

L'arbre de Julia



L'arbre de Julia

Elle a trois ans et elle s'appelle Julia, Et, comme Van Gogh, elle aime dessiner des arbres. Quel pommier magnifique!

Dany l'Immortel...


Dany Laferrière a été choisi. Il a hérité du siège numéro deux de l'Académie française. Ce siège fut occupé en son temps par Alexandre Dumas, un autre "grand" venu d'Haïti.  C'est un honneur pour nous et pour Haïti. Au-delà de l'honneur, il y a le bonheur. J'ai ressenti un beau bonheur tout rond. Et le bonheur m'émeut! Félicitations Dany Laferrière! (G.Thibault)


mardi 10 décembre 2013

Les dessous du premier roman de Dany Laferrière



Dany Laferrière, écrivain

Le premier roman de Dany Laferrière

J'avais décidé de ne pas souffrir durant l'écriture de ce roman. Je venais de quitter une dictature délirante et à partir de cette vie difficile, je voulais créer un univers aussi pétillant qu'une coupe de champagne.

Je tournais en rond dans la chambre, comme hypnotisé par la machine à écrire qui semblait me faire toutes les promesses du monde. Je savais qu'elle gardait dans son ventre toutes les phrases de mon roman. Je devais les extirper de là une à une. Ce ne fut pas toujours facile mais j'avais tout mon temps, je passais mes journées avec le plus beau jouet du monde. Je changeais un mot dans une phrase terne qui se mettait immédiatement à lancer des confettis.

J'étais sûr que ce livre allait me sortir du trou. Pour écrire, il m'a fallu arrêter de travailler. Mes économies baissaient à vue d'oeil. Je devais faire vite et court. Me voilà avec pour toute fortune au fond de ma poche les vingt-six lettres de l'alphabet. Des phrases en paragraphes, de paragraphes en chapitres, pour former une montagne sous laquelle s'agitaient des sensations, des impressions, des émotions. J'ai lancé tout ça au visage du lecteur inconnu qui, au lieu de s'en indigner, l'a reçu avec amabilité. J'en ai écrit d'autres, mais rien n'est comparable au bonheur de voir son premier livre, sous une couverture jaune, à la vitrine d'un libraire entre Moravia et Hemingway. Mon premier livre est paru en novembre 1985 et mon sort a changé et depuis je mène la vie dont j'ai toujours rêvé. Il suffit d'avoir une bonne fée, ce que fut l'écriture dans mon cas. Les livres ne se font pas par hasard, mais parce qu'il y a des lecteurs qui, du fond de leur chambre, les réclament en silence.

Son premier roman, Comment faire l'amour avec un nègre sans se fatiguer  fut un succès immédiat. Laferrière devient l'un des principaux représentants d'une nouvelle génération d'écrivains dans le paysage littéraire québécois. Le livre devint un film à succès et Dany Laferrière, un artiste admiré et aimé des Québécois. Présentement la candidature de  Dany Laferrière est étudiée de près, il est pressenti pour devenir "Un immortel" de l'Académie française.

Je lis: Journal d'un écrivain en pyjama de Dany Laferrière. Merci encore, Pierre Lemay, pour ce si beau cadeau.


samedi 7 décembre 2013

Mandela, un talisman vivant.


Nelson Mandela (1918-2013)




Il était vivant et le monde entier attendait... quelqu'un faisait office de paratonnerre! Je pense que la vibration de cette âme est telle que déjà elle se déploie sur le monde et se répand en bénédictions. Son âme continue de vibrer  infusant dans des milliers de coeurs l'idéal de devenir de meilleures personnes. Des coeurs avec des flambeaux scintillants se répandent.

"En faisant scintiller notre lumière, nous offrons aux autres la possibilité d'en faire autant." (Mandela)

Je suis émue, attristée  et heureuse en même temps, les êtres de cette trempe font monter d'un cran l' humanité piégée dans une mouvance chaotique et immature. Un sentiment immense de reconnaissance m'inonde.

Cher homme, que rien ne puisse venir à bout de votre lumière! Elle est un talisman pour nous.

jeudi 5 décembre 2013

Van Gogh à la porte de l'Éternité



À la porte de l'éternité

Toute sa vie, Van Gogh  avait été sujet à des sautes d'humeur. Il connut souvent des périodes de dépression suivies de soudains accès d'enthousiasme frénétique. La formule biblique "attristés mais toujours joyeux" (2 Cor VI, 10) était une de ses citations préférées. Sa conviction était que la condition humaine était fondamentalement tragique mais avec des moments de ravissement à savourer. 

"Les jours de vent quand le mistral soufflait, j'attelais mon chevalet à des piquets plantés dans le terrain et je travaillais quand même. C'était trop beau!" À Arles, toute sa personnalité, toute sa fougue, éclatent d'un coup. Il peint, furieux de produire, enivré de couleurs vives et ayant répudié tous les mélanges.  Les vergers n'étaient en fleurs que très peu de temps, c'est grâce à sa formidable énergie et à son extraordinaire technique que Van Gogh put venir à bout de cette remarquable série d'oeuvres sur les vergers: "Je suis dans une rage de travail puisque les arbres sont en fleurs et que je voudrais faire un verger de Provence d'une gaieté monstre!"


Branche d'amandier

De nombreux épisodes de troubles mentaux le conduisirent à être hospitalisé trois fois à Arles. Bien qu'aigus, ces accès psychotiques alternaient avec des périodes de lucidité: "Je ne savais pas ce que je faisais, disais, voulais." En 1889, Vincent quitte Arles pour l'asile Saint-Paul de Mausole à Saint-Rémy, où il devait séjourner volontairement pendant un an. L'année suivante, au cours d'une promenade à l'extérieur de l'asile, il peignit pour célébrer la naissance de son neveu, le fils de Théo, son frère, le plus célèbre et le plus poignant de tous ses tableaux d'arbres fruitiers en fleurs, Branche d'amandier. Il écrit à son frère: "La nature m'a raconté quelque chose, elle m'a parlé. J'ai noté ses paroles."





















Champs de blé et cyprès
"Le vert foncé du cyprès est l'élément clé de cette composition. Une tache noire dans un paysage ensoleillé, une tache noire des plus intéressantes". Vincent à Saint-Rémy


L'allée des saules

Étêter les saules et les bouleaux était une activité courante dans la région. Pratiquée depuis le Moyen Âge, cette forme d'élagage rendait les jeunes arbres vigoureux et allongeait leur durée de vie. On récupérait les branches pour se chauffer ou construire des barrières. Van Gogh aimait les dessiner. Dans son esprit, les cyprès et les tournesols avaient fini par incarner la Provence. 

"Pour ma vie à moi, mon projet c'est de faire autant de bons tableaux et dessins que je le pourrai. Ainsi quand ma vie arrivera à son terme, j'espère ne pas m'en aller autrement qu'en regardant en arrière avec amour et mélancolie en pensant: Oh les beaux tableaux!". Outre l'émotion que suscite en nous cette pensée, on ne peut que s'émerveiller par des tableaux aussi spectaculaires peints en un temps si brefs.



Nuit étoilée

Vincent Van Gogh est mort le 29 juillet à l'âge de 37 ans, à Auvers-sur-Oise, en France. Sa mort par suicide  est de plus en plus remise en cause. Voir à ce sujet  le blog suivant:

http://githibault.blogspot.ca/2012/10/van-goghdesesperement-magnifique.html

J'ai lu  Les arbres de Van Gogh de Ralph Skea


mardi 3 décembre 2013

Van Gogh aimait les arbres



Autoportrait

La production artistique de Van Gogh fut prodigieuse: il créa plus de neuf cents tableaux et mille cents dessins en seulement dix ans. Sa carrière en tant que peintre est l'une des plus brèves de l'Histoire de l'art. Presque le quart de son oeuvre représente des groupes d'arbres ou un arbre isolé.


 Les rochers



Route avec cyprès et ciel étoilé

Van Gogh débuta sa carrière artistique en Belgique. Il avait travaillé comme missionnaire laïque dans une région minière dans le sud du pays. Bien que médiocre prédicateur, il se fit accepter de la population en raison de sa gentillesse. Voulant cependant trop bien faire, il commença à montrer des symptômes importants de dépression. Il fut finalement relevé de ses fonctions et son père engagea des démarches en vue de son admission dans un asile. Heureusement, Vincent se rétablit et en août 1880, il prit la décision capitale de devenir un artiste. Il avait des connaissances solides en histoire de l'art, il était cultivé, intelligent et maîtrisait trois langues. Il témoigna d'une formidable créativité. Sa production, au cours des dix années suivantes allait faire de lui l'un des artistes les plus célèbres de tous les temps.

Même lorsqu'il demeurait en ville, Van Gogh gardait sa fascination pour les arbres. Il vécut en dix ans dans onze endroits différents. Cette itinérance masquait chez lui une angoisse et des doutes qui, profondément ancrés en lui, s'étaient manifestés  bien plus tôt dans son existence. En 1868, alors qu'il secondait un pasteur, il prononça en anglais un sermon aujourd'hui célèbre, pour lequel il avait choisi comme sujet le verset 19 du psaume CXIX: "Je suis un étranger sur la terre. Nous sommes des pèlerins, des étrangers." Il avait l'impression de n'être chez lui nulle part et il ne parvint jamais à s'adapter à l'endroit où il s'établissait. Il percevait n'importe quel paysage urbain qu'avec la sensibilité d'un artiste "étranger".


Le semeur

Dans cette oeuvre emblématique, Van Gogh se livre à une improvisation des plus poétiques. Le tableau a des accents presque religieux. Cette petite toile fait quasiment figure d'icône, le soleil entourant telle une auréole la tête du paysan  sanctifié qui sème de nouveau la vie. 



Le Jardin Saint-Paul

Je lis Les arbres de Van Gogh de Ralph Skea 

lundi 2 décembre 2013

Van Gogh et les arbres quasi sacrés


Pins au coucher du soleil


Les oliviers


Jardins à l'asile de Saint-Rémy


Paysages à Arles

Vincent Van Gogh avait conservé de profondes convictions religieuses même après avoir renoncé, vers 1879, à servir l'Église chrétienne, il pensait que cette communion avec la nature devait conduire d'une façon ou une autre à entrer en contact avec le sublime... "ce quelque chose là-haut... d'incompréhensible." Il prêtait aux arbres un caractère quasi sacré. Cette philosophie panthéiste qui consistait à identifier la nature à Dieu, amena Vincent à penser qu'un artiste ne devait jamais dessiner un arbre comme un objet inerte mais toujours ressentir pour lui la même empathie que pour une créature humaine. Son père Théodorus Van Gogh était un pasteur de l'Église réformée des Pays-Bas. Les préceptes fondamentaux du père (s'imprégner des forces spirituelles de la nature) eurent une profonde influence et constituèrent le fondement de la vénération que Van Gogh voua toute sa vie à la nature. "Je suis allé à la campagne, très loin, pour m'entretenir un peu avec la nature." disait-il.

Il aimait les formes extraordinaires des arbres poussant en pleine nature. Il les assimilait souvent à des créatures. "Ces arbres étaient superbes, il y avait un drame dans chaque forme, dans chaque arbre." Il établissait un lien entre les arbres secoués par les vents des tempêtes et les émotions humaines. Dans quelques uns de ses derniers tableaux, la forêt n'est plus le cadre bienfaisant de sa jeunesse, mais elle est devenue un lieu menaçant et angoissant. Certains arbres sont singulièrement sinistres.

Je lis Les arbres de Van Gogh de Ralph Skea

vendredi 22 novembre 2013

Camus / Sartre


Camus (1913-1960)

Sartre tenait le haut du pavé et lui et ses disciples reprochèrent à Camus de ne rien comprendre à la philosophie, la vraie. Camus ne serait donc qu'un imposteur...Sartre va s'imposer dans les années cinquante comme un penseur phare. Et Camus sera rejeté. "Notre amitié n'était pas facile mais je la regretterai." fait-il savoir à Camus en signe d'adieu. Dès 1945, et malgré son amitié pour Sartre, Camus prend ses distances.

Sartre: "Et parce que l'homme est libre, il est responsable. S'il est entravé, c'est à lui de se libérer". Et l'on a appelé ce courant philosophique, l'existentialisme. "Je ne suis pas existentialiste, dira Camus. Il y a des gens qui ne sont pas responsables de ce qu'ils sont, le misérable est innocent de sa misère. Alors? le mutilé, la laide, le timide..." Dire d'un cul-de-jatte miséreux qu'il est libre et responsable ressemble fort pour Camus à de la fumisterie philosophique. Comment profiter  sans mesure de la vie quand des millions de gens meurent de faim? Camus se persuadera que la meilleure façon d'aider ceux qui souffrent est d'être soi-même fort et heureux. (Alain Finkielkraut)

"Je n'aime pas l'humanité en général, je m'en sens solidaire, ce qui n'est pas la même chose. Et puis, j'aime quelques hommes vivants ou morts, avec tant d'admiration que je suis toujours jaloux de préserver ou de protéger chez tous les autres ce qui, par hasard, les a fait ou les fera semblables aux premiers. Je suis l'avocat perpétuel de la créature vivante, parce qu'elle est vivante." Un coeur intelligent dira Finkierkraut, un type bien, toujours!  On ne parle plus de Sartre, Camus vit toujours!

Camus écrit ses Réflexions sur la guillotine, plaidoyer pour l'abolition de la peine de mort, en s'appuyant sur l'absolue cruauté de la sanction et la possibilité de l'erreur judiciaire. Il conclut sur ses mots: "Ni dans le coeur des individus ni dans les moeurs des sociétés, il n'y aura de paix durable tant que la mort ne sera pas mise hors de combat". Je comprends pourquoi il aimait tellement Simone Weil, c'était deux âmes qui se reconnaissaient.

Aujourd'hui, j'ai écouté L'Étranger de Albert Camus lu par Michael Lonsdale, le merveilleux moine de Tibhirine du film Des dieux et des hommes, sur Internet. Camus recevra le Prix Nobel de la littérature en 1957. J'aime Camus.

http://www.blogger.com/blogger.g?  Ancien blog, la mort de Camus

vendredi 15 novembre 2013

Camus, un "coeur intelligent"

Albert Camus

Pourquoi Albert Camus est-il tant aimé?  Des milliers de Japonais se sont rués sur son livre La Peste lorsqu'une partie de la centrale nucléaire de Fukushima a explosé. (réinterprété à l'aune de la radioactivité)  L'Étranger est l'un des livres les plus lus au monde. L'Homme révolté est devenu un livre culte en Ukraine, au Kosovo, en Égypte, en Iran, dans ces pays où les citoyens s'élèvent au péril de leur vie contre la dictature, la corruption, l'injustice ou le fanatisme. Entre sa mère et la justice, il  choisissait sa mère parce qu'elle était un être vivant. Il voulait que l'homme passe avant l'Histoire et il pensait qu'une vie valait plus qu'une idée. Il s'est opposé au stalinisme, à la violence et au terrorisme. Né en Mondovi en Algérie, il voulait que les Arabes et les Européens puissent vivre ensemble à égalité sur la terre qui était la leur, la sienne.

Albert Camus était à la recherche du Bien. Il aimait le soleil, les femmes, l'amour, la vie. Et il doutait. Cet homme né en 1913, avant la Première guerre mondiale, est l'un des penseurs les plus importants du XXIe siècle. Sa pensée répond aux interrogations de notre temps.

C'est l'histoire d'une success story, où un instituteur puis un professeur de philosophie aident le fils d'une pauvre illettrée quasi muette, à devenir Prix Nobel. C'est l'histoire d'un miracle. Camus, l'une des personnalités les plus célèbres des années cinquante, meurt le 4 janvier 1960, dans un accident d'auto.

Il est difficile de comprendre pourquoi L'Étranger, son premier roman, a beau être un best-seller mondial, ses autres livres célébrés, il devient un penseur moqué, un écrivain fini. Et puis tout a changé: sanglé dans son imperméable à la Bogart, il est honoré comme un Christ en gloire contrairement aux intellectuels du temps ceux d'aujourd'hui lui rendent hommage: Michel Onfray, Yasmina Khadra, Imre Kertész, etc... Qu'est-ce qui a transformé Camus en un nouveau Jedi? Ses réflexions sur la place de l'homme dans le monde, sur le suicide, la peine de mort, le terrorisme, la torture  ouvrent un puits de lumière dans la grotte où nous nous débattons.

Mais gare à l'excès d'amour et à la tentation d'en faire un parangon de vertus! Ses  infidélités multiples ont plongé son épouse dans une terrible dépression; capable de discuter avec les plus humbles, il pouvait se montrer arrogant dans les salons élégants. Mais en bout de ligne, c'était un homme dans ce qu'il y a de meilleur et  il est devenu une référence incontournable, l'icône de la révolte et de la résistance.

Extrait d'un article écrit par Catherine Golliau pour la revue Le Point

J'aime Albert Camus.  L'Algérie est le pays d'origine de Guy, mon compagnon. Et son âme reste stigmatisée douloureusement par cet ordre violent de son Histoire : La valise ou le cercueil! Comme Camus, il pense encore qu'il y avait assez de place dans ce magnifique pays et pour les Arabes et pour les Français. C'était peut-être une utopie...




dimanche 10 novembre 2013

Braddock attaque le fort Duquesne, s'ensuit une scène inimaginable....


La Mort du général Edward  Braddock, officier britannique, lors de la bataille de la Monongahela (1695-1755), bataille pour la prise du fort Duquesne.



La garnison du fort Duquesne, au confluent de la rivière Ohio, Alleghanis et Monongahela, est formée de compagnies des troupes de la marine, de miliciens canadiens qui ont construit des cabanes d'écorce à l'extérieur de l'enceinte et de quelques huit cents indigènes qui vivent dans des wigwams; deux de ses côtés sont protégés par les rivières et des palissades de pieux hautes de deux mètres et demi, ses deux autres côtés sont protégés par des remparts épais de trois mètres. Pour que les assiégeants ne puissent s'abriter derrière, les souches ont été rasées au sol. Plus loin, du maïs pousse dans une terre défrichée. Les Anglais sont obsédés, il veulent s'emparer de ce fort français si bien organisé. Le capitaine Braddock à la tête de l'armée britannique cherche un endroit propice où franchir la rivière, ils sont à quatorze kilomètres du fort Duquesne. "Impressionnons les Français!" décide Braddock. Il ordonne que l'armée royale, en uniformes rouges se mettent en ordre de parade pour traverser la rivière, avec musique, bannières, les officiers et la cavalerie à cheval, suivis des Virginiens en uniformes bleus. Harcelés par des nuages de mouches noires qui leur sucent le sang, c'est une parade inutile, le colonel Beaujeu est encore loin. Mais leurs uniformes écarlates font de très belles cibles. Les Anglais crient comme s'ils demandaient qu'on tire sur eux, pensent les Canadiens. En fait, ils chantent le God save the King. L'ennemi est invisible. Les balles ne ratent pas les uniformes rouges mais  c'est un feu désordonné qui tirent sur cet ennemi invisible. Les Indiens sont de terribles guerriers. Partout des blessés geignent et rampent dans le sang de leurs compagnons ne sachant pas où se terre l'ennemi. Ils continuent de tirer sur ces ennemis qui sont partout et nulle part.


Le colonel Washington qui seconde le général vient à son aide  et tente de regrouper les formations. Une balle transperce le bras de Braddok et s'enfonce dans sa poitrine, le colonel regarde avec du mépris dans les yeux, ses soldats en déroute, qui abandonnent leurs compagnons morts ou blessés, les canons, les mousquets, les bagages, les provisions, les coffres des officiers. Plus tard, les vainqueurs reviennent au fort Duquesne avec des chevaux, des boeufs et des chariots chargés de butin: tonneaux, gamelles, mousquets et baïonnettes. Au fort, c'est la fête. Braddock s'éteint au soir du 13 juillet 1755.

À Philadelphie, la nouvelle de la mort de Braddock se répand, un deuil profond se propage dans les colonies.

Pour comprendre les causes de la déroute, le colonel Washington analyse la tactique de Braddock. La première erreur a été d'avoir sous-estimé la force des Français et surestimé la capacité de ses soldats. La deuxième erreur est inimaginable: Washington, avec dureté reproche à ses "chiens de soldats" d'avoir eux-mêmes tué ou blessé les deux tiers des effets britanniques: groupés en un corps de dix à douze rangs, chacun tirait sur l'homme qui marchait devant lui!!!

Le gouverneur de la Virginie ne supporte pas que le menaçant fort français Duquesne soit en territoire anglais. Il verse une somme de quarante mille livres pour financer une seconde expédition. L'attaque n'aura pas lieu en cet automne. Le découragement est total.

Je lis le tome 2 du livre de Roch Carrier, Le fabuleux roman d'un pays

Une magnifique sculpture romaine découverte en plein coeur de Londres




Statue magnifique trouvée en octobre 2013

Des archéologues ont découvert une sculpture romaine en excellent état de conservation sous la forme d'un aigle tenant fermement un serpent se tordant dans son bec. La découverte a été faite sur un site dans la ville de Londres avant la construction d'un hôtel de seize étages. L'équipe du Mola (Museum of London Archeologie) a d'abord hésité à annoncer la découverte et à proclamer ses origines romaines, en raison de son état incroyablement bien conservé. Les spécialistes ont cependant confirmé que la sculpture d'une qualité exceptionnelle remontait au I ou IIe siècle de notre ère et reconnue comme l'une des meilleures statues survivantes de la Bretagne romaine. La statue est aussi nette que le jour où elle a été sculptée. Tout ce qu'elle a perdu c'est sa peinture de surface emportée quand elle a été déposée dans un fossé.

Le symbolisme sous-entendu est la lutte du bien, l'aigle, contre le mal, le serpent. Un important cimetière aurait été situé sur le site. Elle provient peut-être d'un mausolée dont les fondations ont également été découvertes. Le public peut voir dès maintenant, cette pièce rare et remarquable dans toute sa splendeur.

"Simone Weil, le plus grand esprit de notre temps" Camus


Simone Weil

La forme particulière de l'intelligence de Simone Weil la déborde de toutes parts.  Ses tourments physiques la rendent vulnérable, ouverte, béante même. C'est quand elle est très bas qu'elle se sent le plus près du Christ, être au plus bas, donc, ne pas chuter. Là, elle ne peut plus penser à cette éternelle contradiction: Dieu existe, Dieu n'existe pas. Physiquement, elle oublie qu'elle a un corps et devient progressivement un pur esprit. Seule la poésie lui apporte un peu de paix, elle lit saint Jean de la Croix et commente l'apôtre Paul.

Simone  se rend à Carcassonne, sur les pas des Cathares. D'anciens condisciples la décrivent vêtue de bure, les pieds nus dans des sandales, dépouillée de toute préoccupation charnelle, comme une sainte du Moyen Âge. Un moine dom Clément Jacob, après l'avoir écoutée, la traite d'hérétique. Elle est comme une religieuse sans ordre, une personne androgyne, ascétique, un électron libre. Elle n'est qu'écriture. Son corps entier devient écriture. Elle ne se nourrit qu'à minima pour pouvoir encore tenir son stylo. Sait-elle que son temps lui est compté? Jamais elle n'écrira autant.

Pietro Citadi lui consacre un très beau texte dans ses Portraits de femmes: "Simone Weil est dans un autre espace, une autre temporalité, loin de tout, apte à laisser entrer le vide en elle: alors elle ressentait un déchirement intime, et, dans ce vide, descendait la fluidité de la grâce. Un contact infiniment léger, l'espace d'un instant. Elle faisait ainsi descendre son âme en ce lieu inconnu des hommes, où la douleur était joie et la joie douleur."

Même si sa position est sans cesse contradictoire - c'est peut-être pour cela que nous l'aimons tant - elle est de manière inexpugnable, attachée au Christ oscillant entre un Christ historique et un Christ cosmique. Elle a été "saisie" par Dieu, prise pour toujours. Cette joie qu'elle avait découverte de contempler la nature, elle ne se le permet plus, elle ne s'en accorde plus le droit: "Voir un paysage tel qu'il est quand je n'y suis pas. Quand je suis quelque part, je souille le silence du ciel et de la terre par ma respiration et le battement de mon coeur." Pourquoi tant de dévalorisation d'elle-même? Pourquoi tant de volonté de souffrance? Simone Weil considère que l'extrême malheur est une voie d'accès privilégiée à Dieu.

Elle accorde une intensité extraordinaire à la faculté d'attention, une sorte de concentration extrême qui permet l'ouverture de l'âme.

"Il faut savoir mourir, c'est le travail de toute une vie" écrira-t-elle. Simone Weil s'est éteinte dans son sommeil le 24 août 1943, au sanatorium d'Ashford, au milieu d'une nature bienveillante, magnifiée par l'été. Sa mort fait la une des journaux, sa mort a des accents de mystère. Albert Camus dira: "Simone Weil est le plus grand esprit de notre temps." Laure Adler termine son livre en disant: " Le combat pour la reconnaissance de Simone ne fait que commencer."

L'Insoumise, Simone Weil de Laure Adler

samedi 9 novembre 2013

Simone et André Weil en Amérique...


Simone Weil

Laure Adler :

Simone Weil écrit Conseil de la révolte au coeur de l'année la plus noire de la guerre, d'une seule coulée brassant des éléments historiques, mythologiques avec des fragments d'expérience qu'elle a vécus comme ouvrière d'usine et militante politique d'extrême gauche. C'est probablement ce texte qui fut lu en entier par le général de Gaule; il fut à l'origine de la décision de créer le Conseil national de la Résistance.

Soixante ans plus tard, on est frappé en lisant ce livre par l'importance d'une notion bien oubliée aujourd'hui, je veux parler de celle de l'âme. L'âme a des besoins dit-elle, sinon plus que le corps et si on ne prend pas garde de les assouvir, c'est toute notre société qui s'en trouvera déréglée. Le risque est un besoin essentiel de l'âme, sinon que de l'ennui et de la peur.

La famille s'embarqua pour l'Amérique  le 14 mai 1942. Simone exigea de voyager en quatrième classe. Lors de la traversée, on la questionna sur son manque d'appétit. Elle était déjà fort maigre. Elle répondit qu'elle n'avait pas le droit de manger plus que ceux qui étaient restés en France. Elle était obsédée par l'idée de revenir en France et de partager leur malheur. Son frère André était déjà arrivé aux États-Unis, pris en charge par la fondation Rockfeller dans le cadre de sauvetage des scientifiques français. Les Allemands avaient procédé en Pologne, à la destruction systématique des élites intellectuelles juives. Louis Rapkine, un jeune biochimiste canadien avait convaincu la fondation qu'il fallait faire sortir de France, le plus vite possible, les scientifiques français, juifs ou non. En tant que juifs, les parents de Simone craignaient pour leur sécurité et celle de leur fille. 

Des textes inédits maintenant accessibles permettent de restituer l'ampleur des questionnements d'une femme qui se considère chrétienne et qui ne s'est  jamais ressentie juive; elle qui a été arrêtée trois fois par la gestapo mais qui  n'a jamais porté l'étoile jaune; ce qui ne l'a pas empêchée d'entrer en résistance dès 1940 et de lutter contre le nazisme. Elle souffre de son inutilité. Elle fuit ce cafard qui s'empare d'elle en passant ses journées à la bibliothèque, elle y étudie le catharisme et tous les mouvements jugés hérétiques par l'Église: "Je fouille les recoins de la théologie" écrit-elle. Les discussions sont nombreuses avec son frère, André. Elle est tourmentée par l'idée de savoir si elle doit se faire baptiser. Elle prend l'habitude de coucher par terre pour marquer sa solidarité. Plus jamais, elle ne dormira dans un lit sauf malade dans des hôpitaux. Simone Weil brûle.....

Je lis L'Insoumise, Simone Weil, écrit par Laure Adler  (à suivre)

vendredi 8 novembre 2013

Simone Weil, une sainte moderne



Simone Weil, philosophe française (1909-1943)


Je lis L'Insoumise, Simone Weil de Laure Adler


Son nom est connu dans un cercle d'initiés qui la considèrent comme une icône de la pensée contemporaine et qui se ressourcent régulièrement à ses écrits.

Simone de Beauvoir se souvient de l'avoir croisée en juin 1926, dans la cour de la Sorbonne: "Elle m'intriguait, à cause de sa grande intelligence et de son accoutrement bizarre... Une grande famine venait de dévaster la Chine, et l'on m'avait raconté qu'en apprenant cette nouvelle, elle avait sangloté: ses larmes forcèrent mon respect encore plus que ses dons philosophiques."

Simone Weil, pourtant, ne pleurait pas souvent mais elle était en empathie avec les autres ainsi qu'avec les événements. Elle souffrait pour ceux qui souffraient et voulait leur venir en aide. Elle-même a passé sa vie à souffrir, mais ne s'intéressait guère à elle. "Elle n'était pas comme les autres, pas seulement dans son apparence physique, dans sa manière de s'enflammer pour des causes politiques mais aussi pour une profonde indifférence à elle-même, une volonté, avant même d'avoir vingt ans, d'être inquiète de tout et sur tout et de ne pas vouloir s'installer dans la vie". Alain son professeur, celui qui l'avait formée et dont elle se sentira proche jusqu'à son dernier souffle de vie, l'avait surnommée "La Martienne". (Jacques Ganuchaud)

Elle n'avait cure de ses migraines, de son état d'épuisement. Elle était tellement volontariste qu'elle pensait qu'elle allait encore gagner contre cette fatigue immense pour continuer à écrire sur l'avenir de la France et vivre enfin ce moment où son pays serait libéré.

France Culture m'offrit la possibilité, à l'été 2007 de lui rendre hommage. Je me plongeai alors, pour la première fois dans cet immense chantier que sont ses cahiers. Ce fut une véritable odyssée, un vertige. L'admiration se transformait en passion. Ce livre est un livre d'admiration qui se donne pour but d'agrandir le cercle des amoureux de Simone Weil .

J'aime déjà d'amour Simone Weil, de cette sorte d'amour que j'éprouve pour Etty Hillesum, morte elle aussi en 1943 mais dans un camp de concentration. Ces deux saintes des temps modernes m'habitent et me font du bien. Je pense souvent à elles. J'ai collé au mur, il y a quelques années, la photo de Simone et je croise tout le temps son regard... qui me regarde et son doux sourire ... qui me sourit. Une subtile interpellation spirituelle se met à bouger en moi, toujours la même: devenir une meilleure personne, une personne attentive.

Malgré la souffrance, Simone était un être solaire aimant à rire, discuter, faire de l'humour, nager, aller au théâtre (elle connaissait par coeur des livrets d'opéra). Elle aimait l'Italie jusqu'à la folie, s'absorber dans la beauté d'un paysage ou d'une peinture, bref, une dévoratrice de tout ce que pouvait lui offrir la bonté des êtres et la beauté du monde. Laure Adler

Comment ne pas l'aimer!   (à suivre)

jeudi 7 novembre 2013

Poème-éloge pour les artistes du monde....




Paysage, Paul Cézanne



J'aime les artistes et leurs oeuvres...

De tout temps, l'homme maltraite la Terre
et de tout temps le peintre  reconstruit  
les paysages baignés de leur splendeur originelle

De tout temps, l'homme maltraite les animaux
et même l'homme des cavernes les reconstruisait 
sur les murs, dans leur liberté sauvage originelle

De tout temps l'homme maltraite l'homme
créant toutes sortes d'esclavage
et le sculpteur le reconstruit dans sa beauté originelle

L'artiste plonge dans la matière 
jusqu'à l'étrange danse des atomes et il  reconstruit le monde 
dans de mystérieuses abstractions originelles

Et moi, je regarde, je me laisse imprégner,
je me laisse dériver, je me laisse aimer ...

Gisèle Thibault


Poème pour Pierre Lemay