mercredi 26 novembre 2014

L'assassinat de Georgi Markov



Georgi Markov 1929-1978

Le KGB avait déjà tenté à deux reprises d'assassiner Georgi Markov, un dissident bulgare expatrié. La police secrète bulgare aidée par les célèbres services secrets soviétiques (KGB) choisirent la date de l'anniversaire de Todor Zivkov, leader bulgare du parti communiste et fantoche des soviétiques pour essayer une fois de plus de tuer Markov. Ils commirent le meurtre politique le plus étrange jamais perpétré. Cadeau d'anniversaire pour le plus grossier et le plus rustre des dictateurs.

Le 7 septembre 1978, Londres profitait d'un temps agréable et Markov était en route vers son bureau au service international de la BBC. Il venait de traverser la Tamise au nord et tandis qu'il  passait devant l'arrêt de bus, il se fit piquer, sans raison,  à la cuisse par un homme qui tenait un parapluie. Ce dernier s'excusa avec un accent étranger très prononcé, et s'éloigna rapidement.

Markov ressenti immédiatement une douleur aiguë et cuisante là où sa peau avait été heurtée. Lorsqu'il arriva à son bureau, il remarqua qu'une petite croûte rouge s'était formée et que la douleur devenait de plus en plus lancinante. Il raconta à un de ses collègues de la BBC l'incident du pont. Le soir même, il eut une forte fièvre et fut admis à l'hôpital. Il y mourut trois jours plus tard.

Avant de mourir, Markov ne cessa de répéter aux médecins qu'il pensait avoir été empoisonné. Son corps subit dès lors une autopsie scrupuleuse, et les résultats furent stupéfiants: les médecins légistes découvrirent une petite boule de métal de la tête d'une épingle, logée dans le mollet.

L'analyse de cette boule par le service de recherche de chimie de l'armée britannique révéla une cavité qui contenait des traces de ricine, une toxine létale. Il n'existe encore aujourd'hui aucun traitement pour ce type d'empoisonnement.

George Ivanov Markov quitta sa Bulgarie, alors derrière le rideau de fer, pour l'Europe. Il avait publié un roman, Men, qui lui valut d'être fait membre de l'Union des Écrivains Bulgares. La plupart de ses pièces ne furent jamais jouées: la censure de l'État interdisait leur représentation. Son ambitieux roman "Le toit" fut également censuré. Markov ne put plus supporter le régime de Zivkov où la délation était devenue une activité normale. Il s'installa à Londres et y travailla comme journaliste et homme de télévision. Il critiquait fréquemment le régime communiste bulgare et il se trouva rapidement au sommet de la liste des ennemis de ce gouvernement. En son absence, il fut condamné à six ans de prison, ses oeuvres retirées des librairies et des bibliothèques, et il devint invisible, une "non-personne" dont le nom ne devait jamais être mentionné.

Depuis 1978, plusieurs transfuges ont déclaré que le KGB était responsable du meurtre de Markov. Apparemment, la boule imprégnée de ricine n'était pas la seule recette du KGB. L'une des autres options était une gelée empoisonnée qui aurait pu été tartinée sur la peau de Markov. Personne ne fut condamné pour le meurtre de Markov. Les soupçons se portèrent sur un certain Francisco Gullino, seul agent bulgare  d'origine danoise ou italienne se trouvant à Londres au moment des faits. Les preuves contre lui étaient trop faibles pour une extradition. Il a depuis disparu.

La tombe de Markov se trouve dans une église paisible du Dorset, dans son pays d'adoption, alors que la Bulgarie postcommuniste a publiquement rendu hommage à ce fils disparu, pour ses oeuvres littéraires, et son opposition à la tyrannie de Zivkov.

Je lis Les grands assassinats de l'Histoire de Stevens Parissien.

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