mercredi 23 octobre 2013

Marcel Légault, authentique éveilleur d'humanité

Marcel Légault (1900-1990)


Marcel Légault est ce mathématicien français qui quitta une brillante carrière universitaire pour vivre dans "sa" montagne et y élever des moutons.  Il réunissait chez lui des petits groupes de gens préoccupés comme lui par les problèmes religieux. Il disait que le passage de Jésus-Christ a marqué puissamment l'histoire de l'Humanité, mais les conséquences de cet épisode déjà lointain s'amenuisent visiblement et sont condamnées, sans doute, à disparaître. Défections individuelles mais continuelles, à chaque génération.

Il écrit: "C'est une passion de comprendre ma foi chrétienne en inventoriant son contenu, ses structures et la consistance de ses éléments. J'ai étudié un par un les "articles de foi" qui constituent la doctrine de la Sainte Église catholique, apostolique et romaine, passant du difficile à l'impraticable. J'ai buté sur la fameuse sentence de saint Cyprien,"Père de l'Église" au IIIe siècle, reprise par Origène et perpétuellement maintenue par Rome: "Hors de l'Église, point de salut!"

Il met le doigt sur l'étrange comportement d'un Dieu qui se dira "père commun des hommes"et qui commence par se choisir un seul peuple pour être le sien, promis à la domination sur tous les autres. (Quel danger pour l'orgueil et les prétentions de cette race dite "élue"). 

Il se méfie de ce qu'il nomme "le fonds ancestral de superstition" où persiste la tendance première des hommes. Il déplore, au milieu du Ier siècle, la construction d'une synthèse qui s'impose à la pensée chrétienne. "Je ne prononce pas le nom de Paul, mais c'est bien lui qui est en cause lorsqu'on recherche l'origine d'une certaine idée barbare, primitiviste, inadmissible de la Rédemption. La mort de Jésus pour la rémission des péchés apparaît dans les évangiles uniquement dans Mathieu, sans que nous puissions savoir si ces mots figuraient dans la très antérieure version araméenne de son texte. Paul accrédita, en outre, que la résurrection du Christ était l'essentiel du christianisme et que sans elle, il n'était rien. Il va jusqu'à déclarer: "Si le Christ n'est pas ressuscité, vide est alors notre message; vide aussi notre foi" (I Co, 15-14). Comme si une victime sanglante était réclamée par Dieu. Mais sous la poussée du vieil esprit juif ou survivait du paganisme, les apôtres  insufflés par Paul lancèrent la légende donnant la mort sur la croix pour le but ultime et quasi unique de la vie de Jésus, réponse à une volonté expresse de Dieu, décret impitoyable du Tout-Puissant.

Bouleversés et comme enivrés par les comportements, les paroles, la rayonnante personnalité de Jésus, les disciples furent pour ainsi dire contraints, presque malgré eux, dans leur passion et leur enthousiasme pour ce ressuscité, à proclamer "ce qu'ils appelèrent sa divinité". Ils ne trouvaient pas d'autres mots pour nommer ce qu'ils devinaient de sa "transcendance" et de son extrême liaison avec Dieu. Ces juifs ne se rendaient pas compte  de la légèreté, de l'extrême obscurité, de l'invraisemblance de leur proclamation: Jésus est Dieu! formule s'ouvrant sur l'inconcevable. Nul ne saurait dire combien une affirmation trop rapide, trop superficielle de la divinité de Jésus a pu nuire, au cours des siècles, à l'intelligence de son humanité et de sa mission.

C'est si clair...

Extrait du livre Malheureuse Église de Henri Guillemin
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