Robert Kennedy
Je lis Passages américains, de Marie-Claire Blais
Robert Kennedy savait qu'il vivait à l'ère d'une criminalité ouverte avec la guerre au Vietnam, et quelques années plus tôt, ce dont il ne guérirait jamais, l'assassinat de son frère John Kennedy, le 22 novembre 1963. Quand il apprit l'assassinat de Martin Luther King, le sénateur devait prononcer un discours à un groupe en majorité noir. Juché sur une plate-forme de camion, son discours fut remplacé par ces quelques mots: "Mes amis, j'ai de bien tristes nouvelles pour vous et pour tous ceux qui dans le monde vénèrent la paix. Martin Luther a été tué ce soir à Memphis, au Tennessee".
Ces instants qui furent si cruels, présageaient une descente dans un enfer de violence. On éliminait indifféremment les plus vulnérables à la tête d'un pays, qu'ils fussent gouvernants encore imprégnés d'idéalisme, d'humanité, ou prêcheur, poète comme l'était Martin Luther King, ou militant comme le fut Malcolm X, n'allions-nous pas tous les perdre, les uns après les autres, dans la même froide barbarie?
Mais c'est surtout l'esprit qu'on voulait tuer en Robert Kennedy, Martin Luther King et Malcolm X, l'esprit de désobéissance à un ordre inéquitable, social ou racial.
De cette voix brisée, Robert Kennedy implora la foule, en ce jour d'avril 1968, d'éviter tout désir de vengeance, ..." car ce n'était pas la saine direction que devait suivre un pays. Comme Martin Luther King nous l'a appris, ferons-nous un effort pour mieux nous comprendre, afin que cette tache sanglante puisse enfin disparaître, oui, sur notre nation, notre terre". Robert Kennedy savait que cette nuit serait une nuit d'émeutes, de fusillades, de tueries. Il y avait eu en si peu de temps, trop de sang versé. Le sénateur, ce 4 avril 1968, croyant vain tout discours de consolation cita le poète Achille, "dans notre sommeil, la douleur que nous ne pouvons pas oublier se répand goutte à goutte dans notre coeur, jusqu'à ce que de notre désespoir naisse la sagesse." Ses enquêtes et la rude droiture de son combat contre les associations de malfaiteurs, lui avaient attiré de nombreux ennemis. R.K. sentait tous ces remous hostiles, mais n'en continuait pas moins sa lutte.
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