mercredi 25 novembre 2009

Jeu de Tock et Événements d'Octobre

Quelques pages de vie....

J'ai acheté un jeu de Tock dans une braderie. Et ce jeu m'a ramenée 39 ans en arrière.

C'était en octobre 1970.

Le Québec était en pleine révolution. À la télé, Gaétan Montreux de Radio-Canada, venait de lire aux Québécois le fameux "Manifeste" du F.L.Q. Le Québec entier était dans la consternation. Peu après, les arbitraires mesures de guerre de Pierre-Éliott Trudeau étaient votées et l'armée envahissait les rues de Montréal.

Moi, je vivais aussi une révolution. Une révolution de Femmes!  J'ai demandé le divorce. Je décidais de bousculer un homme, ma famille, mon patelin et l'Eglise. Ma mère m'a accueillie les bras ouverts. J'avais deux enfants, Dominicke et Marie-Héllène et ... j'étais enceinte. Je faisais doublement partie des Événements d'Octobre. Mon Pays était aussi perturbé que moi. L'espérance, la vie et la mort se côtoyaient.

Chaque soir, une amie, celle que j'appelais "l'Archange" dans mon coeur, venait chez ma mère. Elle amusait les enfants, elle inventait de longues histoires palpitantes et quand les petits s'étaient endormis, on s'attablait et on jouait au Tock, avec maman et ma soeur Mimi. Elle s'était donné une mission: me faire rire un peu et même beaucoup, chaque soir, " afin que l'enfant que je portais puisse entendre les vibrations de mes rires à travers mon ventre".

Marie-Héllène avait attrapé la rubéole et moi, n'ayant jamais eu cette maladie, je devenais porteuse d'un enfant potentiellement à risques. La liste était longue et cruelle des complications de santé pour le foetus. On m'a inoculé le vaccin le protégeant à 70%. Le 30% restant drainait à lui seul une inquiétude cauchemardesque qui sabotait toutes mes nuits.

Je vivais un sentiment de libération mais aussi une culpabilité obsédante envers mes enfants, je les privais d'un père au quotidien. Mille inquiétudes financières brisaient mon moral, le père refusant à sa famille toute pension alimentaire.

Au septième mois de grossesse, une radiographie a révélé que je ne portais pas un enfant... mais deux !!! Alors là, les mille inquiétudes se sont diluées dans une angoisse violente. Il s'agissait de mettre au monde deux enfants dans un état de santé hypothétique, et en pleine démarche d'un divorce qui s'annonçait orageux: le père demandait à la Cour la garde des deux aînés !!! Sous une fragilité extrême, une grande force bagarreuse m'animait pour protéger le bien-être et surtout l'équilibre et le bonheur de mes enfants.

Mon amie s'amenait avec son accordéon sous le bras et une détermination accrue de réussir son pari. L'ampleur de sa "mission" prenait de la complexité ce qui la motivait encore mieux. Elle était tellement drôle... certains soirs je croulais sous mes rires. "Les deux petites filles entendaient chaque soir, les vibrations de mes rires à travers mon ventre". Les jumelles, Anne-Emmanuelle et Frédérique-Anne sont nées dans un parfait état de santé, belles comme des coeurs!

Indispensable  Jeu de Tock!

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