dimanche 19 juin 2011

Trois soeurs en cavale


Gi, Denise et Mimi

C'est un rituel. Un autre. Une ou deux fois par année, les trois soeurs Thibault partent en cavale toute une journée. Nous vivons alors, une joie qui vient de l'enfance, une émotion subtile qui fait de nous des personnes reconnaissantes envers le mystère de ces temps d'innocence où nous étions des petites filles vivant sous le même toit et les deux grandes, dans le même lit. Rires, taquineries, souvenirs parfois communs, parfois non encore dits, temps des confidences. Nous avons chanté le Frédérique de Léveillée et papa était là, avec nous, émouvante présence. Nous sommes trois soeurs de bonne humeur et le temps a bien fignolé cette sororité devenue avec l'âge, un trésor encore plus précieux.

Programme: le Jardin botanique en après-midi: mille odeurs de fleurs, mille couleurs de roses, une fraîcheur bienfaisante en plein coeur de la cité torride et des ampoules aux pieds.

Un gueuleton de choix dans un resto proche de la Place des Arts et la présence de Richard Séguin tout près de nous. Il souriait, on l'entendait parler à des amis: "Vous allez aimer le spectacle, c'est très beau!" leur disait-il. J'aimais le regarder. Et ce que j'y ai vu correspondait avec exactitude à l'idée que je me faisais de lui: une belle âme sertie dans un beau visage. Richard et Marie-Claire Séguin ont crée un enchantement dans l'énergie dynamique et créative de ma famille. C'était bon de le voir ainsi tout près, alors que nous savions que l'instant d'après nous le verrions en spectacle.

Spectacle fabuleux et émouvant: Douze hommes rapaillés chantent Gaston Miron, le poète. L'espace d'un instant, j'ai senti monter en moi la ferveur et l'espérance d'un pays. Mon âme s'exaltait. Aujourd'hui, ce sentiment s'est édulcoré tout doucement et je m'en attriste.

À bientôt mes soeurs!

dimanche 12 juin 2011

Claude Léveillée


Claude Léveillée

Peu à peu, ma tristesse se métamorphose en joie: un artiste de génie est passé. Et j'étais là, vibrante, à aimer son oeuvre et à aimer cette ère de renaissance que vivait mon Québec. Ce même jour, trois de mes enfants se sont positionnés devant ce deuil.

Anne-Emmanuelle, c'est la championne pour atténuer la vibration dramatique de mes débordements de sensibilité: "Mom... c'est quand même pas la mort de John Lennon! Voyons!"

Vivement, aller rejoindre Marie-Héllène!!! Elle m'a prise dans ses bras et elle m'a dit : Mes condoléances maman!". Elle savait. C'est la deuxième fois que Marie-Héllène pose ce geste à mon endroit. C'était il y a longtemps, quand Mélina Mercouri est décédée.

Dominicke, dès qu'il a su, a tout de suite pensé à moi. Il m'a écrit. Lui aussi savait. Une enfance, imprégnée par les musiques de Théodorakis, Léveillée, Vigneault, Ferland, les Séguin... et Beethoven et Vivaldi.

Ce jour-là, on soulignait à nouveau mon anniversaire; Conrad a avoué qu'il avait pleuré lui aussi. Ah! C'était bon à entendre! Un homme en plus! Un musicien! J'aime bien Conrad! Le papa de Rose... Des milliers de personnes sont allées lui rendre hommage à la Cinquième salle de la Place des Arts. Il fut le premier québécois à donner un récital dans cette salle mythique. J'étais là!

vendredi 10 juin 2011

Claude Léveillée


Claude Léveillée (1933-2011)

Sa musique, dans ses envolées lyriques, a ruisselé sur mon âme. J'avais 20 ans, j'avais 25 ans, j'aimais... cette poésie "qui nous saoulait le dedans de pathétique". Par lui, j'ai découvert Nelligan, Gilles Vigneault...Par lui et les autres, j'ai senti le Pays vibrer en moi dans une floraison fabuleuse d'espoir. J'entends encore, parfois, cette onde de choc et d'éveil, d'existence et de fierté m'envahir mais maintenant presque toujours, elle s'allonge et se couche en tristesse dans un coin déçu de mon âme.

Félix Leclerc avait déployé pour moi une poésie de fables et de mots parlant de la beauté du monde. Claude Léveillée chantait une poésie qui bouleversait mon coeur: "Amène-moi au bout du monde... rien qu'une seconde..." Il est le principal vecteur d'intensité de ma jeunesse et de mes amours et à travers mes larmes, c'est aussi cette jeunesse que je pleure, la sienne, la mienne.

"Où sont passés les grands chevaux
qui nous faisaient libres et beaux ...

Je m'en vais sur la Lune,
Prenez grand soin de mes oiseaux,
Je m'en vais sur la Lune,
Prenez grand soin de cette pierre..."

Oui, Claude Léveillée, l'Artiste, message entendu!... Adieu et Bon Vent!


mardi 7 juin 2011

Photos d'un âge béni, soixante-dix ans!


Mamigi joue avec balle et bouteille


Mimi, Anne-Emmanuelle et Michelle


Guy


Lou-Hélène


Marie-Sol


La Julia


Anne-Emmanuelle


Dominicke


Frédérique-Anne


Marie-Héllène et les premiers pas de Julia


Une tablée d'enfants fous

En ce 8 juin 2011, j'ai 70 ans!


Jeannie et Gi


Marie et Gi


Lou-Hélène et Marie-Sol


Pour mon anniversaire, mes enfants ont loué une grande maison, en montagne, pouvant recevoir 26 personnes. Nous étions 25. Nous étions "la famille". Et ce sentiment éclatant de complétude que je ressentais, c'était ça le grand cadeau! Tous ces visages tant aimés de mes enfants et de mes petits-enfants tournés vers moi... de David et Rosalie, 15 ans, jusqu'à la Julia qui nous fit cadeau de ses premiers pas. Alice, 16 ans, l'aînée, était absente mais je me suis approchée de son coeur à plusieurs reprises pour qu'elle ne me manque pas trop... je connais son adresse cosmique, maintenant! Mes deux filles-amies, Marie-Sol et Lou-Hélène étaient là aussi, deux joyaux inestimables.

Marie-Sol: sa mère avant de nous quitter prématurément, m'a gratifiée d'une ultime demande, celle de toujours rester en contact avec ses deux enfants. Je l'aime depuis qu'elle est au monde!

Lou-Hélène: c'est ma fille Marie-Héllène qui m'a demandé si je voulais bien l'adopter. Elle ne pouvait supporter l'idée que son amie soit orpheline... J'ai accepté. Et j'ai découvert que nous étions déjà en lien du coeur dès le premier instant où je l'ai rencontrée, bien avant l'alliance officielle avec ma famille.

Il manquait Olivier, le frère de Marie-Sol et Hugues, si cher ami, bien loin, en Europe de l'Est. Leur présence m'aurait été agréable et douce. J'ai réuni en pensée tous mes fils et filles cosmiques afin que ma joie soit parfaite. Et ma joie fut parfaite!

Y avait une telle liberté de mouvance: les enfants couraient, jouaient, des épéistes émérites s'affrontaient dans les cris de défaite et de victoire, sans oublier la célèbre partie de Ballon-Chasseur! Dominicke et Pierre grattaient leur guitare. Les anecdotes fusaient et les rires jaillissaient d'une source pure, nous étions une tribu d'amour. Une longue table pleine de victuailles et de bon vin et un plaisir palpable d'être tous là. De dormir et de se réveiller ensemble. Moment arrêté. Moment de conscience. Moments engrangeurs de souvenirs, de ceux-là qu'on aime à se souvenir justement!!! C'était magnifique!



Dans 10 ans, j'aurai 80 ans! Comme la vie est étrange. Des heures si longues parfois et les années qui restent, si follement courtes...

Mes enfants,

Au-delà d'une transmission d'amour que vous perpétuez si bien avec vos enfants, je vous demande à tous d'entretenir ce côté rebelle que je pense avoir semé en vous. Je lis le livre "Il y a trop d'images" , un vrai beau cadeau! Je me joins à la parole de Bernard Émond: "Résister, c'est la grande affaire. Il n'y a rien de possible sans cela. Résister à l'insignifiance ambiante; chaque geste de générosité est un acte de résistance et de liberté". Mes enfants, soyez aimants mais aussi rebelles et fiers! Recherchez la culture, les arts, la beauté. La Beauté mène à la transcendance. Si vous êtes là, à ce moment-ci, sur Terre, il y a une raison. J'ai toujours aimé penser que le monde était meilleur du simple fait de votre présence ici-bas.

Et n'oubliez pas, vous n'êtes pas seuls. Il y a une Vie, une Présence, un Appel à plus grand que soi en vous. Il y a aussi l'appartenance à votre famille, votre "tribu", choisie comme piste d'atterrissage. Bon choix! Bon choix! Utilisez-vous avec confiance!

J'ai toujours été émue de l'implication inconditionnelle de Mimi envers ma famille, envers sa filleule et les enfants de sa filleule. Chère Mimi... j'ai mille gratitudes pour ta présence si fidèle et si enjouée. Mes enfants, vous avez tous en vous, collées à votre âme une vibration de tendresse qui porte son nom. Celui de l'archange aussi.

J'ai une famille extraordinaire. Il y a Louise, celle qui dure, qui s'inscrit dans la pérennité de la famille. Et Pierre, celui qui aime. Et Charles, celui qui bâtit. Et Scott, celui qui nous trace une voie dans son Amérique.

Et, il y a Guy, ce conjoint de fin de vie, celui qui a su susciter en moi un désir d'engagement. Cet homme que j'aime...

Cette écriture me fait du bien. Une telle puissance émotionnelle génère le fameux petit creux de l'après-fête. Je me remets en place doucement.

Un mot encore. Vous êtes aimés mes enfants! Soyez bons!

Votre Mom, Gi, votre mamigi xxx

La fête des trois gémeaux, Marie-Hélène, Rosalie et moi

jeudi 2 juin 2011

John Guy et les Béothuks, un acte manqué...



En 1612, un explorateur et marchand anglais, John Guy accosta à Terre-neuve dans l'espoir de fonder une colonie et il réussit à établir un lien d'amitié avec les Béothuks. En partant à la fin de l'été, il leur fixa un rendez-vous, comme le faisait Champlain. Il leur dit: "Nous reviendrons l'an prochain et nous ferons une grande fête. Nous vous apporterons des clous, des marmites, des haches". Or, le destin en décida autrement.

Pour des motifs commerciaux, John Guy ne put revenir l'année suivante et c'est un bateau de pirates anglais qui accosta, par hasard, dans la baie. Confiants et en toute amitié, des centaines et des centaines de Béothuks, réunis sur la berge pour la grande fête, reçurent à grands cris ceux qu'ils pensaient être John Guy et son équipage. Les pirates apeurés par cette multitude sauvage, sortirent leurs canons et tirèrent dans le tas. Il eut beaucoup de morts et d'amertume. Les Béothuks ne firent plus jamais confiance aux Européens.


Shanawdithit

Les Européens vécurent dès lors, dans la frayeur des Béothuks. Quand ils venaient pêcher durant l'été, lorsqu'ils repartaient l'automne venu, ils laissaient leur établissement sans surveillance. Les Béothuks ne se gênaient pas pour s'y approvisionner, sans échange ni négociation. Et, ils devinrent dépendants du métal avec lequel ils fabriquaient leurs harpons et leur tête de flèches. La situation s'envenima et une guérilla s'installa.

Les Français réclamèrent à la France les services de l'armée et même le droit d'exterminer les assaillants. La France n'envoie pas l'armée mais cautionne l'abattage à vue des Béothuks. Les Français ne s'en priveront pas ni les Anglais. Même les Micmacs et les Abénakis, payés par les Blancs pour tuer les Béothuks, seront impliqués dans ce que d'aucuns qualifieront de génocide. Il faudra attendre 1760 pour que les autorités de Terre-Neuve décrètent la fin des hostilités. En vain, on continuera à tuer les Béothuks qui continueront à voler les Européens. Ceux-ci se vengeront en tuant les Béothuks jusqu'aux derniers. Beaucoup moururent de la tuberculose et d'autres maladies apportées par les colons.

Le peuple a été officiellement déclaré "éteint" en tant que groupe ethnique en 1829 avec le décès de la dernière survivante répertoriée, Shanawdithit.

Extrait du livre De remarquables oubliés, tome 1. Merci, Dominicke pour ce livre si intéressant.

Les Béothuks, peuple sacrifié

Extrait tiré du livre Elles ont fait l'Amérique écrit par Serge Bouchard et Marie-Christine Lévesque.

Les Béothuks occupaient l'île de Terre-Neuve depuis la nuit des temps. Ils enduisaient leur visage et tout le corps d'un ocre rouge, même leurs canots et leurs pagaies et même les squelettes retrouvés dans leur tombe étaient rouges. Les Blancs les appelleront les Red Indian. Cette désignation s'étendra ensuite à l'ensemble des peuples amérindiens, les "Peaux Rouges". Les Béothuks sont des chasseurs-cueilleurs, des pêcheurs chevronnés et de formidables artisans. En 1500, ils pouvaient être entre 500 et 1 000 dans l'Île.

Terre-Neuve constituait une véritable manne pour les pêcheurs d'outre-mer et jusqu'au XVIIe siècle, l'île fut progressivement envahie par les Anglais et les Français, puis par les Micmacs qui s'installaient le long des côtes forçant les Béothuks à se replier dans les terres. Mais les trappeurs occupaient aussi l'intérieur du territoire, où ils chassaient le petit gibier... et les Indiens.

Leur histoire est tragique. J'aurais aimé que ce livre fusse écrit lorsque j'enseignais l'Histoire à des enfants de sixième année. J'ai beaucoup appris en lisant ce livre.(à suivre...)